Fées noires & Dames sombres – La dame verte de Caerphilly
La dame verte de Caerphilly
C’est sous la forme de lierre grimpant qu’apparaissent les traits de la Dame verte de Caerphilly. Nombreux sont les témoins qui ont aperçu au travers du feuillage serré les yeux fascinants de la fée, la silhouette de ses formes. Elle, autrefois belle et aimante grande Dame, trop aimante sans doute, ce qui provoqua sa chute et la malédiction de son époux.
Pour qui découvre pour la première fois le château de Caerphilly, celui-ci ne peut que s’étonner de cette tour qui penche et menace à tout moment de s’effondrer. A côté de cette curiosité due à l’attaque des troupes de Cromwell, la forteresse bâtie par Gilbert de Clare tient toujours debout. Mais il existe une autre curiosité bien plus étrange qui se murmure de bouche à oreille dans le pays. On y raconte que la belle Alice d’Angoulême serait revenue de son exil ou de sa mort pour hanter les lieux…
C’est au retour de la visite de ce château qu’Edouard V., l’un de mes amis les plus chers, me rapporta l’étrange phénomène dont il fut le témoin. Il était venu au château de Caerphilly accompagné de quelques connaissances tout aussi férues d’histoire anglaise qu’il l’était. Le plus important château médiéval d’Angleterre, après celui de Windsor, ne pouvait qu’attirer la curiosité de mon ami Edouard qui y vit là une belle occasion de revoir ses connaissances de cette période anglaise riche en batailles et changements. Avant sa visite, il était déjà bien au courant de la légende mettant en scène ce fantôme féminin qui rôdait dans les parages de la place forte. Cette petite histoire des plus croustillantes l’avait même poussé à en parler ouvertement avec leur guide qui se limita à en retracer l’essentiel. Une histoire d’amour, une infidélité et la rivalité entre deux hommes que tout opposait. L’un, fabuleux guerrier au corps robuste et doté d’une maladresse de sentiments commun à la plupart des gens brusques. L’autre, un dandy aimant, doué pour les caresses et les compliments, choses devant lesquelles les dames finissent toujours par succomber, bien plus que devant bravoure et coups d’épées. Quoiqu’en disent les romans d’aventure, la rose sera toujours plus agréable que la sueur, le doux mot poétique pourfendra toujours plus de cœurs. Mais la force unie à la colère frappent souvent et le malheur toujours se répand. Voilà la mie veuve de son amant, poursuivie des sbires d’un mari trompé. Les siècles ont passé, la jouvencelle rampe, dit-on, le long des murs de Caerphilly, Dame verte, fantôme gris.
Le récit du guide avait presque endormi mon cher Edouard quand il se décida à quitter discrètement la compagnie de celui-ci pour s’aventurer le long des remparts. C’est là, qu’au détour d’une muraille, il vit aussi distinctement que je vous vois, un tissu de lierre trembler. La chose n’eut été pour le moins peu étonnante s’il n’y avait eu ce soir-là aucun vent. Se rapprochant au plus près, tentant d’apercevoir quel animal, oiseau ou gardien s’amusait à secouer ainsi le végétal, Edouard aperçut dans l’entrelacement des branches, la forme d’un corps. Se matérialisa devant ses yeux, la fameuse Dame verte de Caerphilly tentant à maintes reprises de se saisir de mon ami, faisant jaillir les traits d’un beau visage plaqué de feuilles et de brindilles. C’était comme si l’être essayait de sortir du lierre, pour prendre forme humaine. L’hallucination ne dura que quelques minutes, mais marqua durablement l’esprit de mon ami qui eut toutes les peines du monde à dormir cette nuit-là et bien des nuits suivantes.
Une histoire triste et poétique !
Je n’imaginais pas la Dame Verte comme un fantôme, plutôt comme une sorte de nymphe unie aux plantes et à la forêt…
Mais j’aime beaucoup ce récit.
C’est exact, pour les Dames vertes du Jura. Ici c’est une légende liée à la Dame de Caerphilly au Pays de Galles…