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  • Fées noires & Dames sombres – La Strige

    Fées noires & Dames sombres – La Strige

    La Strige

    Mi-femme, mi-oiseau, la Strige a pour honteuse friandise le sang de ceux qui sont encore nourris de lait. Elle survole les campagnes à l’affût de quelque nourrisson ou enfant en bas âge qu’elle pourrait enlever afin de le vider de son sang. Les paysans ont recours à diverses incantations pour la tenir à l’écart de leurs maisons. Si l’une de ces démones tombe sur leurs fourches, elle périra dans les flammes, seul moyen de la détruire définitivement. Cette cousine du vampire est bien plus âgée que lui et bien plus animale encore.

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    Les gens du village avaient barricadé portes et fenêtres. Cela faisait quelques jours que la panique s’était emparée de la région. Une Strige était apparue et avait déjà enlevé trois enfants. Les attaques se déroulaient de nuit, la fée pénétrant dans les habitations par une fenêtre laissée entrouverte. Mais la dernière incursion maléfique l’avait été de façon spectaculaire, le monstre mi-femme, mi-oiseau ayant fait exploser la porte d’entrée d’une chaumière pour s’emparer du nourrisson qui se reposait dans son berceau posé près de l’âtre afin de bénéficier de la chaleur des braises. Les parents qui dormaient au fond de la pièce n’avaient pas eu le temps de réagir. Ils virent avec horreur leur enfant emporté par les griffes de la sorcière. Cette dernière attaque avait semé l’émoi et la peur dans tous les hameaux voisins. Les hommes montaient désormais la garde dans les ruelles tandis que femmes et enfants se blottissaient ensemble dans le coin d’une pièce, attendant apeurés que les premières lueurs de l’aube les placent à l’abri de cette Strige.

     

    Quelques jours après le dernier incident, des hommes arrivèrent au village. C’était des chasseurs. Pas des tireurs de lapins, mais bien des pourfendeurs du mal incarné. Ils étaient lourdement armés de piques et de mousquets. Ils portaient sur leurs habits le signe royal, car ces hommes avaient été recrutés par le souverain du pays et entraînés par les meilleurs maîtres d’armes afin de combattre les striges qui étaient apparues un soir d’hiver, il y a plusieurs saisons de cela. Depuis des années, les combats avaient fait rage. Les restes calcinés de bûchers improvisés se rencontraient au détour de nombreux chemins.

     

    Nul ne sait comment et pourquoi les Striges s’éveillèrent en masse. Certains prêcheurs y voyaient l’apogée du Mal, la venue du sombre Maître des Ténèbres. D’autres prétendaient qu’elles avaient été libérées d’une prison ancienne par une maladresse quelconque ou simplement à cause de la vétusté de leur carcan.

     

    La réalité avait rejoint les légendes. Les menaces soufflées aux enfants, que les striges les emporteraient s’ils ne faisaient preuve de sagesse n’en étaient plus. En cette époque obscure, la peur serrait les entrailles des hommes, des femmes comme de leur progéniture. Tous tremblaient chaque nuit et l’espoir ne reposait plus que sur ces hommes en noir. Les chevaliers du roi.

  • Fées noires & Dames sombres – Madela

    Fées noires & Dames sombres – Madela

    Madela

    Madela ou Madera est surtout présente en Birmanie où les mères la craignent. Cette fée maudite qui appartient au redoutable monde des Nats, apporte la fièvre aux enfants et fait pousser des hurlements aux nourrissons. Porteuse de maladies, elle répand le malheur dans les maisons et on ne compte plus le nombre de prières et de conjurations prononcées par les mères bienveillantes afin de tenir la fée éloignée de leur progéniture.

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    La fièvre durait depuis plusieurs jours. Les enfants étaient alités, baignant dans leur sueur. La mère, à bout de force, passait d’un lit à l’autre, posant sur les fronts chauds des bandes de tissu mouillé. Elle fredonnait une douce chanson, tentant de calmer les spasmes et tremblements de ses enfants. La fièvre était apparue un soir, chez le nourrisson. Il s’était agité plus que de coutume cette nuit-là et sa mère avait veillé jusqu’au petit matin à ses côtés. Puis, les trois autres, tour à tour, avaient eux aussi commencer à trembler, à ressentir dans tout leur corps ces courbatures annonçant le mal qui s’emparait d’eux. Au bout du troisième jour, les enfants commencèrent à ressentir d’autres symptômes. Ils maigrissaient à vue d’œil et l’état du bébé devenait vraiment inquiétant. Il avait moins de ressources que les autres et s’épuisait à pleurer continuellement. Les seuls moments de calme intervenaient lorsque, épuisé, il sombrait dans le sommeil. Un sommeil que les autres redoutaient, tellement ils étaient en proie à d’affreux cauchemars. C’est le récit de ces mauvais rêves qui mit la puce à l’oreille de la grand-mère partageant le même toit que le reste de la famille. Les enfants ne cessaient de répéter qu’une femme, portant un long voile blanc déchiré en lambeaux pour tout vêtement se présentait à eux durant la nuit, riant de leur malheur, posant sa main froide sur leurs fronts brûlants, répandant encore plus le mal dans leurs petits corps. La vieille dame reconnut une légende qu’elle entendait souvent dans son village natal, celle d’une démone, d’une sombre fée, d’une Nat. On l’appelait Dame Madela. Et sans aucun doute, c’est elle qui s’était installée dans leur demeure. La grand-mère fit ses paquetages ce jour-là et sans une explication quitta la maison. Le quatrième jour au soir, on frappa à la porte. C’était l’aïeule qui était de retour et elle n’était pas seule. Un vieil homme se tenait à ses côtés. Il avait le corps couvert d’inscriptions, le cou entouré de colliers et talismans. Un sorcier, un guérisseur. La mère, fatiguée, les laissa entrer. L’homme leur demanda de le laisser seul dans la chambre avec les enfants. Il jeta un dernier regard vers la mère, il voulut lui sourire, la rassurer mais ses yeux noirs, puissants, la firent reculer. Elle esquissa un geste de retenue mais la grand-mère la prit dans ses bras, lui chuchota que tout se passerait bien. Le sorcier entra dans la chambre. Des cris, des pleurs, des menaces et des prières. Toute une litanie de formules, de marmonnements. La nuit passa ainsi. De temps à autre, la mère pouvait entendre les pleurs de son bébé ou la voix douce d’un de ses jeunes enfants. A l’aube, l’homme sortit de la chambre. La grand-mère lui offrit à boire et à manger. La mère, elle, se précipita dans la chambre pour y trouver ses quatre enfants endormis. Paisiblement allongés sur leurs nattes, plongés dans un sommeil sans rêve. Elle posa la main sur chacun des fronts. Plus de température, la fièvre s’en était allée avec Dame Madela.

     

  • Fées noires & Dames sombres – Lorelei

    Fées noires & Dames sombres – Lorelei

    Lorelei

    Les marins allemands chantent encore la tragique histoire de Lorelei, la nixe du Rhin. Autrefois une femme amoureuse s’étant jetée dans le fleuve, son amour perdu, son innocence trahie. Aujourd’hui, un esprit errant, une sirène se vengeant des hommes en les prenant à son tour dans ses filets. Des filets qu’elle tisse d’une mélodie séductrice et de son doux visage pourvu d’yeux qui noient quiconque y plonge le regard.

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    Ferdinand Marsternsteig

    Une petite embarcation dérivait sur le Rhin. Elle longeait les rives, oscillant maladroitement, portée par les courants. A son bord, un homme était allongé, vraisemblablement endormi. La barque s’engouffra dans un bras et finit par s’encastrer dans la berge. Secoué, l’homme s’éveilla. Il paraissait complètement déboussolé. Il regardait autour de lui sans reconnaître les lieux. Jetant un œil surpris à ses vêtements mouillés. Puis, au bout de quelques minutes, il descendit de l’embarcation pour prendre pied sur la berge. Il marcha longtemps avant de tomber sur des gens. Ceux-ci, à l’état misérable de l’homme, s’enquirent de sa santé. Ils lui demandèrent d’où il venait, qui était-il. Autant de questions auxquelles l’homme ne parvenait à répondre. On l’emmena à l’hôpital. Un médecin l’ausculta et ne lui trouva rien de grave. Une radiographie révéla quelque chose d’anormal, il avait de l’eau dans les poumons. De toute évidence, l’homme avait failli se noyer quelques heures plus tôt. Une enquête fut ouverte.

    Au fil des jours, les pièces du puzzle se reconstituaient. La police put identifier l’homme grâce à son portrait diffusé dans la presse et au coup de téléphone d’un membre de sa famille. C’était un célibataire d’une trentaine d’années dont le sport favori était la pêche. Ceci expliquait la barque et sa présence le long du Rhin. Chose étrange, d’habitude, il ne pêchait que sur un des affluents du fleuve. Avait-il poussé son envie jusqu’à oser naviguer sur le Rhin. Sa barque s’était-elle renversée. Mais alors qui l’avait secouru ? Tant de questions restaient en suspens sans que le principal témoin ne puisse en dire davantage. L’homme avait sombré dans une douce folie. Il marmonnait sans cesse un prénom, celui de la célèbre Nixe allemande : Lorelei. Il divaguait. On le plaça dans plusieurs maisons de soin, mais à chaque fois, sa folie se faisait plus affirmée, son comportement devenait plus violent. Il se débattait, hurlait qu’il voulait rejoindre le Rhin. Enfin, on eut l’idée de le placer dans un centre en bordure du fleuve. L’homme accepta ce nouvel endroit. La fenêtre de sa chambre donnait sur le fleuve et il passait la journée, assis devant la vitre à regarder l’eau s’écouler. Il murmurait un chant que personne ne connaissait, une mélodie douce, envoûtante, très belle. Son esprit était perdu. Son cœur, lui, ne voyait qu’elle.

  • Fées noires & Dames sombres – Les Lamies

    Fées noires & Dames sombres – Les Lamies

    Les Lamies

    Filles de Lamia, les Lamies ont conservé un goût prononcé pour les enlèvements de jeunes enfants. Pour avoir séduit Zeus, Lamia subira la colère d’Héra qui assassinera ses enfants. Crime ô combien insupportable qui transformera la jeune et belle dame en un monstre affreux. Depuis lors, ses descendantes lamies se nourrissent de la chair tendre des nourrissons qu’elles viennent enlever dans les berceaux jusqu’aux jeunes puceaux, héros qu’elles encharment d’une troublante beauté, masque revêtu quelques secondes avant de dévoiler leurs gueules monstrueuses.

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    Herbert James Draper

     

    Lorsque nos enfants grandissent et qu’ils atteignent cet âge où les plaisirs de la nuit les attirent irréductiblement, il est souvent difficile pour les parents de les laisser partir le soir, fréquenter les bals ou les laisser déambuler dans les rues sous l’éclairage de la lune et de quelques rares réverbères. Cela est d’autant plus le cas en ces contrées où les légendes nous mettent en garde contre ces créatures qui rôdent dans les ombres et cherchent à se nourrir du sang ou de l’essence de leur jeunesse. Le côté vil et abject de ces monstruosités ne se présente pas souvent sous les traits de la laideur. Pour appâter une proie, il faut lui montrer de quoi attiser sa curiosité et ne pas présenter une apparence qui la ferait fuir ou la dégouterait. C’est le cas des Lamies qui prennent souvent la forme de belles jeunes filles, un peu perdues, solitaires, naviguant de bal en soirée à la recherche de celui qui finira inévitablement par leur adresser la parole. Si le jeune homme est à leur goût, elles fermeront le piège tendu, pour son grand malheur et celui de ses parents qui, à l’aube venue, trouveront son lit vide, pour toujours.

     

    Nikos n’avait pas dix-neuf ans lorsqu’il fut embarqué par plusieurs de ses amis pour la soirée de leur vie. Les garçons avaient reçu l’invitation des mains de superbes jeunes femmes rencontrées à la plage le jour d’avant. Elles leur avaient promis une soirée aussi secrète qu’inoubliable. De quoi éveiller leur désir et convaincre leur témérité. Le rendez-vous avait été fixé sur une des plages au sud de la ville, derrière les rochers. Quand les jeunes débarquèrent, ils y trouvèrent d’autres garçons de leur âge, déjà occupés à festoyer en compagnie d’une vingtaine de filles, toutes plus belles les unes que les autres. L’alcool coulait à flot et l’ambiance monta très vite entraînant le groupe de Nikos dans la folie de cette soirée décidément pas comme les autres. Les jeunes hommes croyaient rêver : de telles filles, on en voyait qu’à la télé ou dans les soirées très privées de stars.

     

    Ayant un peu trop bu et trop vite, Nikos s’éloigna vers la mer. Il se jeta dans l’eau. La fraîcheur de celle-ci eut pour effet de le réveiller. Au bout d’une vingtaine de minutes, il retourna à la grotte, mais l’ambiance avait changée. Les filles étaient assises sur les corps des jeunes hommes et les dévoraient. L’une d’elle leva la tête, elle avait les yeux remplis d’une rage meurtrière. La Lamie aperçut Nikos et hurla. Plusieurs créatures foncèrent vers lui. Sur la plage, les vagues frappaient le sable, seules témoins de ce jeune garçon qui courait, poursuivi par une horde de fées assassines.

  • Fées noires & Dames sombres – Kitsune

    Fées noires & Dames sombres – Kitsune

    Kitsune

    Esprit séducteur, le renard Kitsune prend la forme d’une jeune femme rencontrée au hasard des chemins et dont la beauté s’empare du cœur solitaire. Usant de subterfuges pour dissimuler sa queue qui trahit sa nature magique et animale, la Kitsune finira bien tôt ou tard à perdre en vigilance. Fuyant la découverte de son amant, la fée reprendra alors les traits du renard pour disparaitre, laissant l’homme seul et le cœur brisé…

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    La jeune femme marchait tranquillement sous les cerisiers en fleurs. Une pluie de pétales roses tourbillonnait autour d’elle, lui ouvrant le passage dans cette allée des Temples. Le jeune moine observait la scène, troublé en sa méditation par l’apparition. Il ne pouvait détacher les yeux de cette magnifique jeune femme qui déambulait et à qui la nature semblait ouvrir les bras. Quand il réalisa qu’elle venait dans sa direction, il était déjà trop tard pour fuir, pour esquiver cette tentation, cette épreuve que les dieux lui envoyaient sans aucun doute. Elle sourit et un autre monde s’ouvrit à l’esprit du jeune moine. Autour de lui, le monde dansait. Les visions vinrent ensuite. Des souvenirs de son enfance heureuse dans un petit village du nord du Japon, coupé de la réalité des villes, plongé dans une campagne où le temps ne semblait pas avoir de prise. Seules importaient les saisons. Un autre songe l’emmena dans une maison étrangère. Une femme était couchée à ses côtés, endormie. Dans la chambre d’à côté, à travers les cloisons, il percevait des rires étouffés. Des rires d’enfants. Les rêves se succédaient lui renvoyant des possibles qui se mélangeaient allègrement à des souvenirs heureux. Au-delà des hallucinations, il percevait un doux murmure, un chant qui le berçait et l’entraînait davantage dans un sommeil éveillé. C’était la fée, apparue quelques instants plus tôt qui fredonnait ce chant magique, cette mélodie hypnotique et se moquait du moine, faisant vaciller ses certitudes, basculant en quelques secondes des années de méditation, de gestes répétés méthodiquement, d’habitudes ancrées en une soif de vie et d’aventure, de rencontre et de désir. Elle était tentation.

    Le moine ferma les yeux. Il se mit à réciter un mantra de concentration, se rappelant les bons conseils des maîtres et chassant de ses pensées l’impureté d’une vie trop matérielle. Lorsqu’il ouvrit les yeux bien plus tard, une pluie fine tombait depuis le ciel bleu. La femme avait disparu. Sur le chemin des cerisiers, un renard trottinait.

     

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