Étiquette : Belgique

  • La Grande Interview de l’Elficologue Pierre Dubois – extrait n°4

    La Grande Interview de l’Elficologue, la suite (4)

    interviewpierredubois

    Toujours installés sous le seringat, le « jasmin des poètes » tout en fleurs et en parfum, sur la petite terrasse au pied de la magnifique ferme de Pierre Dubois, l’échange se poursuit autour de Jean Ray et des premières lectures fantastiques. Pendant que Pierre évoque ses souvenirs de jeunesse, des murmures et gazouillis nous parviennent depuis ce territoire de verdure abandonné aux fées, couloirs de verdure où les petits êtres s’amusent à observer l’homme qui, au fil du temps, est devenu leur ami, leur porte-parole…

    pierredubois0401

    pieredubois0402
    pierredubois0403
    Richard Ely : Tu connaissais la vie de Jean Ray, sa légende ?
    Pierre Dubois : Non, je ne connaissais pas sa vie. Sa légende, oui. Je lisais les préfaces. Il y avait Henri Vernes qui écrivait Bob Morane, il avait son messager, son annonceur. Je dois d’ailleurs beaucoup à Henri Vernes quelque part…
    Richard Ely : Tu les a croisés ?
    Pierre Dubois : Je n’ai pas croisé Jean Ray. Il est mort avant que je puisse le rencontrer mais j’ai rencontré sa fille. J’ai fait des émissions sur lui. J’ai rencontré Marcel Thiry, qui était un écrivain fantastique et qui l’avait édité dans les Cahiers de la Biloque. J’ai rencontré le Père De Kesel des éditions Presto films qui était à l’abbaye d’Averbode et qui m’a parlé de Jean Ray, des parents de Jean Ray, et puis sa fille… Je suis allé chez lui mais ça c’est par la suite. Au départ, j’ai cru comme tout le monde à la légende qu’il s’était forgée par lui-même et qu’Henri Vernes avait d’ailleurs magnifié en parlant de piraterie. Il n’était pas loin quand même, Jean Ray était un pirate, un pirate en chambre mais un pirate quand même. C’était encore plus extraordinaire de nous avoir fait croire à toutes ces histoires ! Il s’est fait une légende et je trouve ça étonnant.
    pierredubois0404
    pierredubois0405
    Richard Ely : Est-ce que cela t’a donné une certaine vision de l’Angleterre ?
    Pierre Dubois : Oui, j’ai découvert l’Angleterre mythique, l’Angleterre à laquelle on rêve parce que lui-même rêvait son angleterre. Remarque que lorsque tu vas à Gand ou Bruges, tu as l’impression d’être à York par certains moments, dans certaines rues de Londres, c’est la même brique, une brique un peu sombre, un peu fumée et les trottoirs… Après j’ai découvert Whitechapel, il y a plus de trente ans, presque quarante ans maintenant. Javais une vingtaine d’années, Whitechapel ressemblait encore à Whitechapel. Maintenant, c’est transformé. Y a des quartiers de Londres complètement défigurés par les architectes. Quand tu penses que Big Ben était la plus haute tour et que maintenant y a une espèce de grand suppositoire hideux, sans âme, qui déforme complètement les docks, c’est triste. Mais il subsiste encore des petits coins où l’âme de Londres est perceptible. J’ai un ami qui vit à Londres et qui m’emmène dans des endroits comme ça. Le pub où le Capitaine Bligh et Fletcher Christian se cuitaient la tronche avant de monter sur le Bounty, des endroits où Nelson venait rencontrer sa maîtresse, où Dickens venait régulièrement, où Sax Rohmer, l’auteur de Fu Manchu, Mac Orlan ont vécu,… Mon ami connaît les endroits et tu n’es pas déçu car tu vois le Londres qu’a connu Jack l’éventreur, et Conan Doyle, tout y est. Tu débouches dans une rue et tu sens qu’Oliver Twist, Fagin et Sikes, l’affreux Bill Sikes, sont passés par là. Y a des fantômes, tu grattes un petit peu et tu les trouves, même pas besoin de gratter, un petit brouillard et puis ça y est.
    pierredubois0406La mystérieuse Whitechapel de Londres…
    pierredubois0407Du vieux Londres au vieux Bruges…
    pierredubois0408Gand, ville de Jean Ray… L’entendre évoquée par Pierre me ramène à cette belle cité où j’ai moi-même vu le jour…
    pierredubois0409
    Richard Ely : Tous ces classiques que tu cites, tu les as lus en anglais ?
    Pierre Dubois : Non, en français, je ne maîtrise pas suffisamment l’anglais pour retrouver toute la saveur, la substance. Je veux bien faire confiance au traducteur à ce moment-là qui lui connaît bien la langue pour aller au plus près.
    Et donc cette Angleterre rêvée est belge en même temps. J’avais d’ailleurs une réelle fascination pour la Belgique. Quand j’étais enfant, j’avais donc des parents en Belgique. Je vivais en France. Je suis ardennais, né dans les Ardennes. Après, on est parti à Valenciennes et c’était une ville proche de la Belgique. Il y avait Quiévrain. On allait régulièrement chez des parents en Belgique et c’était un pays qui me fascinait. Déjà, il y avait la frontière, ça m’a toujours intrigué les frontières. D’autant plus que c’était une frontière dangereuse car il y avait des douaniers et qu’on ramenait des choses qu’il fallait pas. Le tabac, le café à l’époque, c’était interdit. C’était impressionnant pour un enfant, ces personnages avec des capes, ces gendarmes avec des grands chapeaux, des espèces de haute forme qui les faisaient paraître encore plus grands, et en plus ils étaient en noir. On franchissait la frontière et là, brusquement, il y avait un déballage publicitaire que je ne trouvais pas en France, y avait Jaffa, le tabac Jaffa, on y voyait un homme avec sa pipe, ça me faisait penser à Sherlock Holmes ou à un dragon qui fumait… y avait un dragon cuirassé qui fumait la pipe, j’adorais. Mes oncles fumaient aussi des cigares avec des bagues en papier, ils avaient des belles boîtes et ces cigares sentaient bon, y avait des décorations toutes dorées… Puis, il y avait aussi les affiches de cinéma que tu voyais un peu partout, peintes à la main. Ce n’était pas du tout comme aujourd’hui, une pauvre photographie du comédien principal. Qu’est-ce qu’on a perdu quand il n’y a plus eu d’artistes pour peindre les affiches de cinéma ! Moi, j’ai des souvenirs de véritables tableaux, de flamboyance extraordinaire où tu voyais Robin des bois, ou Errol Flynn dans Capitaine Blood, dans A l’abordage avec Maureen O’Hara, la rapière à la main… c’était des rêves, aujourd’hui, je ne sais plus quel film, sur Peter Pan, sur l’histoire de Barry. Il y a quelques temps on aurait vu Peter Pan surgir de la tête de Barry, ici tu n’as que la photo de Johnny Depp, on dirait un photo de carte d’identité ! Où est le rêve là-dedans, c’est épouvantable ! Donc moi, je découvrais toutes ces images et l’image a été également fondatrice pour moi. C’était autant de miroirs pour Alice au pays des merveilles. Chaque affiche, chaque image je rentrais dedans. Je rentrais dans les boîtes de tabac de mes oncles, dans les affiches… Ma vieille tante était marchande de parapluies et avait des affichettes sur sa vitrine qui annonçait des films comme le Prisonnier de Zenda, La Perle noire, Scaramouche, Ivanhoé, les Chevaliers de la Table Ronde, tu imagines ! Et quelquefois déjà aussi un peu érotique, tu étais tout jeune et il y avait ce côté interdit, enfant non admis, c’était écrit. Tu imaginais un tas de choses, la créature, la belle indienne ou la belle espagnole, la flibustière des antilles avec sa gorge dénudée, l’épaule dénudée, qui maniait le pistolet, c’était ambigu. Les westerns avec les filles avec des fouets, les squaws, c’était magnifique. Je découvrais la Belgique, le côté « anglais » de la Belgique à travers ces produits que nous n’avions pas en France. Les bonbons, les cuberdons, et certaines boutiques ressemblaient à des gravures anglaises où les bonbons étaient dans des bocaux. Où ça sentait bon quand tu entrais et toute cette Angleterre que je rêvais au travers d’images, je la retrouvais un peu en Belgique. Et puis la Belgique était flamboyante, ça paraît tout bête mais les boites aux lettres y était rouges avec un blason dessus. Tous ces petits détails, ça paraît insignifiant mais ça fait rêver un enfant. ça va révéler des choses en toi, te marquer, ça va affiner tes goûts, tes besoins, tes amours, tes rêveries… Et puis, tu avais des images de Londres, tu avais Guinness, Guinness is good for you. Y avait le whisky, Tintin, Spirou, toute cette bande dessinée qu’il n’y avait pas en France. Quand je retournais en France, je retournai dans un monde moins excitant, il y avait une espèce de paradis perdu, y avait un goût de paradis, de jardin et je me réfugiais dans mon jardin et je revivais tout.
    pierredubois0410
    pierredubois0411
    pierredubois0412
    La Belgique de l’enfance rêvée de Pierre… avec ses boîtes aux lettres rouges, ses gendarmes et douaniers, ses magasins de bonbons, les publicités pour le tabac, la bière, la guinness…
    pierredubois0413
    pierredubois0414
    pierredubois0415
    pierredubois0416
    pierredubois0417
    pierredubois0418

     

  • Le Sabbat d’Ellezelles, le rendez-vous du dernier samedi de juin à ne jamais manquer !

    Des fées chez les sorcières : le Peuple féerique au Sabbat d’Ellezelles !

    Fées et sorcières sont cousines, c’est bien connu. Du Petit Monde à l’univers de l’Etrange, il n’y a qu’un petit pas, vite franchi, surtout lorsqu’on se voit équipé d’un ramon, ce fabuleux balai de sorcière qui leur permet de franchir les haies et les buissons…

    C’est donc avec joie que j’ai reçu lors du Sabbat 2013 les honneurs et sortilèges de ce village plein de traditions ricanantes et joyeuses…

    La journée du Sabbat fut bien remplie: artisans, animations, musique et autres joyeusetés attendaient les visiteurs venus en nombre pour cette 41ème édition de l’incontournable rendez-vous ellezellois. Une décoration soignée, des sorcières farceuses, des artisans de qualité, des promenades animées, tous les ingrédients d’un moment enchanteur, quelquefois effrayant mais certainement marquant !

    Les amateurs de Féerie n’étaient pas oubliés, quelques personnages faunesques voire lutinesques erraient entre les sorcières…

    Enfin, le soir arrivé, le grand spectacle sons et lumières pouvait commencer avec son lot d’anecdotes locales et mondiales, son loup-garou, ses sorcières, le tout sous la haute surveillance de l’homme en rouge…

    Une célébration qui a mené les centaines de spectateurs jusqu’au coeur de la nuit sous les danses endiablées des terribles Chorchiles d’Ellezelles !

    Rendez-vous cette année, dernier samedi de juin, pour une nouvelle et spectaculaire édition. A noter que j’y serai en dédicace en compagnie de Christian Pieman pour un livre de contes étranges autour des créatures de la région.

    fees-sorcieres-ellezelles05

     

    fees-sorcieres-peuple-feerique04

    fees-sorcieres-peuple-feerique07

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat05

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat11

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat12

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-13

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-14

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-15

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-16

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-17

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-21

     

     

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-delleze-19

    fees-sorcieres-peuple-feerique-sabbat-ellezelles20

    fees-sorcieres-sabbat06

    sabbat_ellezelles08

    sabbat_ellezelles09

    sabbat_ellezelles10

    sorcieres_ellezelles02

    sorcieres-sabbat03

  • Interview de Vanessa Gerkens, harpiste féerique

    Il y a des instruments qu’on associe avec évidence au monde des fées. La harpe est de ceux-là. Vanessa Gerkens est une artiste belge, une harpiste féerique qui aime à adoucir les maux de sa musique, à évader les esprits de ses notes… Chacun de ses albums est une invitation à transgresser la frontière de féerie et à se laisser emporter par mille papillons aux ailes dorées vers un Ailleurs apaisant et souhaité. Une jolie rencontre pour le Peuple féerique que nous partageons avec vous.


    Votre musique est très douce, très apaisante, elle invite au rêve et au voyage. Une façon de parler d’un Ailleurs ou, au contraire, de donner l’envie de revenir ici et maintenant, à l’essentiel de la vie ?
    Cela dépend… certains morceaux invitent à l’évasion, au voyage dans un Ailleurs propre à l’imagination de chacun et d’autres morceaux inspirent, j’espère, l’auditeur à redécouvrir l’essentiel.

    Vous attachez beaucoup d’importance au coté thérapeutique de la musique, d’où vous est venue cette envie d’accompagner les gens ?
    L’envie m’est venue tout naturellement en fait, à l’occasion de ma première grossesse.
    Je me suis rendue compte que me petite fille réagissait (in utero) différemment en fonction des morceaux que je jouais. Et j’ai décidé de me lancer dans des recherches sur l’influence des sons de la harpe sur le foetus et la femme enceinte. Mes différentes expérimentations et découvertes m’ont fait aboutir à la conclusion que la harpe était le seul instrument à proposer un panel de sons aussi large et donc un véritable massage sonore intégral.
    J’ai eu envie d’aller plus loin, de partager les bienfaits de la harpe et j’ai donc créé l’harponomie: un accompagnement de la naissance par la harpe ( plus d’infos sur mon site... !).
    La vie a fait que j’ai rencontré par la suite des personnes qui m’ont fait part de l’effet bénéfique de mes cd’s sur leurs douleurs ( physiques et psychiques). Et je me suis tout naturellement penchée sur cet aspect car il me parait essentiel d’utiliser tout ce qui est en notre pouvoir pour accompagner au mieux les personnes qui souffrent de douleurs chroniques, de maladies graves ou qui sont en fin de vie.
    La musique est incroyablement positive dans les hôpitaux: elle déstresse le personnel médical, les patients et leur entourage. Je peux l’observer à chaque fois que je vais jouer en pédiatrie pour l’association « Les messagers du coeur ».

    Et la féerie, comment est-elle entrée chez vous et pourquoi aimez-vous ce monde ?
    Très honnêtement, cela fait tellement longtemps que je ne me rappelle plus !
    J’aime la richesse des personnages des contes féeriques, j’aime cette idée d’un monde parallèle qui nous renvoie si bien nos pires défauts et nos plus belles qualités ! C’est un véritable coup de foudre…. et cela ne s’explique pas !

    Le monde de la féerie et de la harpe semblent s’associer naturellement ?
    C’est vrai ! La harpe a cette image d’instrument magique, raffiné, féminin… On l’associe aux fées, aux anges et pourtant cela n’a pas toujours été le cas. La harpe a aussi été considérée comme un instrument de Satan à une certaine époque et brûlée sur la grand-place ! Comme quoi !

    Vous avez travaillé la musique en tant que moment accompagnant la naissance mais aussi la mort. Deux moments-clés très présents dans la féerie. C’est aussi une des raisons de votre association musique-féerie ?
    Je n’y avais pas pensé ! Mais non, le fait de m’inspirer des fées et autres personnages de Féerie pour mes compositions et le fait de m’intéresser à l’accompagnement du début et de la fin de la vie sont deux choses bien distinctes pour moi. Ces deux moments sont aussi des moments-clés pour nous humains…!



    La musique est-elle raconteuse d’histoires ? Vous proposez d’ailleurs dans cet album un petit conte qui lui donne son nom. L’histoire d’Ayweline…
    Bien sûr ! La musique est un vrai moyen de transport pour s’évader et s’inventer des histoires ! J’ai eu envie de partager le conte que ce morceau m’avait inspiré et j’ai donc écrit l’histoire de cette fameuse Ayweline ! J’aime raconter des histoires pendant mes concerts, donner un point de départ à mon public afin qu’il parte avec moi à la rencontre des Korrigans ou simplement à Venise ( ma ville préférée !).

    Comment naît un album ? Une composition ?
    Généralement, je me mets à la harpe et me laisse aller à vagabonder sur mes cordes jusqu’à ce qu’une mélodie naisse. Elle peut soit naître d’une émotion, soit faire naître un personnage, un lieu, une ambiance… De là, je plonge un peu plus dans ce qui s’est créé et le morceau se construit de lui-même au fil des jours…

    Pour l’album, il se construit en fait au fur et à mesure des compositions. Tout se fait assez naturellement en soi.

    La harpe semblait un peu oubliée et depuis quelques années elle revient de plus en plus … Une explication ?
    C’est vrai qu’elle revient ! Je pense que les gens sont en demande de bien-être, de musique relaxante à notre époque. Nos vies sont tellement stressantes que la harpe s’avère un remède bienvenu !

    Quelle est votre créature féerique préférée et pourquoi ?
    J’aime beaucoup les Pillywiggins ! Ils sont gais, pleins de vie et si beaux à regarder de par leurs multiples couleurs ! Ce sont des êtres extrêmement positifs !

    Votre actualité? Vos projets ?
    Beaucoup de projets comme toujours… Il y a bien sûr la préparation du » Brussels Harp Festival 2010 – Les Féeries de la harpe », un week-end consacré à la découverte de la harpe dans tous ses états ! ( www.harpanova.com )
    Il y a aussi la composition de mon prochain cd, un concert en octobre à Vieusart ( Belgique), la continuité de mes recherches sur l’utilisation de la harpe pour diminuer la douleur,…

    Propos recueillis par le Peuple féerique en juillet 2009

    Découvrez tout l’art de Vanessa Gerkens sur http://www.harponomie.be/

  • Les Nutons du Condroz – Alain Voisot (Editions Dricot)

    Les Nutons du Condroz
    Alain Voisot
    Editions Dricot
    82 pages
    Sortie: 1/9/2008
    Prix: 12,50€

    Présentation éditeur:
    Pour l’auteur, Liège est une ville encore pleine de secrets enfouis dans son passé prestigieux et héroïque. Il y puise quelques détails et les place sur le parcours de ce conte fantastique qui nous fait découvrir une nouvelle famille de Nutons. Cette randonnée insolite à travers la Province de Liège fait références au patrimoine liégeois. Les allusions et les références foisonnent et participent au décor de cette histoire qui traverse plusieurs sites connus de la région liégeoise. Les héros, Laurent et Adrien, sont entourés de personnages fantasques, cocasses et redoutables. Les deux frères adolescents, résidant à Dalhem sont venus en vacances chez leur grand-mère à Ouffet. Ils découvrent par hasard l’entrée du monde des Nutons du Condroz. Ce conte  » régional  » fait un alliage entre la tradition des contes populaires liégeois et le patrimoine historique du Pays de Liège. Il est  » fantastique  » par sa conception reprenant le principe d’une aventure à rebondissements durant lesquelles les héros doivent parcourir un itinéraire initiatique à travers… la Province de Liège. En partant d’Ouffet pour aller à pied au Pays des Macrâles de Haccourt les deux jeunes héros de l’histoire traversent des lieux connus et rencontrent des personnages insolites, fantastiques et inquiétants. Le conte se termine au Château de Modave et dans la superbe vallée du Néblon. Mêlant l’histoire et le surnaturel en s’appuyant sur des faits et des sites connus, ce conte remet en lumière les œuvres de Jean Noel Hamal, le Mosasaure, Hubert Goffin… Le passé minier du bassin liégeois invite au mystère de son monde sous terrain formant un réseau de galeries propices aux fantasmes les plus insolites et les plus inquiétants.

    Notre avis:
    C’est à une jolie balade dans la région de Liège que nous invite Alain Voisot en prenant pour héros ces gnomes hantant la Wallonie belge que sont les Nutons. Dans un livre au public pas vraiment ciblé (les héros sont des enfants mais le style d’écriture varie entre tournures plus orientées adultes et tournures plus simples, plus accessibles pour la jeunesse), l’auteur parvient à redonner vie aux contes et légendes de son pays. Une très belle initiative qu’on aimerait voir fleurir un peu partout. Certes l’accent moderne donné ici aux nutons et à leurs activités peut dérouter les puristes mais les contes ne sont-ils pas faits pour évoluer avec leur temps ?
    En résumé, une jolie petite histoire qui a pour premier mérite de revisiter Liège et ses environs. De quoi lui redonner ses couleurs légendaires…

  • Rencontre avec Albert Moxhet, spécialiste du légendaire wallon et ardennais

    Albert Moxhet est un nom qui ne vous dira peut-être pas grand-chose si vous n’êtes pas wallon. La Wallonie étant la partie francophone et germanophone de la Belgique. Albert Moxhet y est connu pour ses études sur la sorcellerie et le légendaire. Un légendaire riche de sorcières mais aussi de lutins ou gnomes qu’on appelle les Nutons. Patrimoine partagé en grande partie avec l’Ardenne française. Alors que plusieurs ouvrages sont en voie d’édition ou de réédition (il était temps !), d’autres, comme l’excellent Ardenne et Bretagne, deux soeurs lointaines vient tout juste d’être épuisé. Nous avons posé quelques questions à cette incontournable figure de la féerie ardennaise.


    Dans Ardenne et Bretagne, les sœurs lointaines, vous comparez, voire rapprochez les deux légendaires propres à ces régions. Comment vous est venue l’idée de cette étude ?
    Ardennais baigné dès l’enfance dans les légendes de ma région, j’ai toujours été intéressé par le monde celtique (Irlande, Écosse, Bretagne,…). La connaissance de celui-ci s’est structurée en particulier par l’étude de la Matière de Bretagne à l’Université de Liège (Philologie romane). Dans les années 1970, j’étais le « gardien des légendes » d’émissions radio de Philippe Longtain à la RTB (pas encore F), émissions portant notamment sur le fantastique. Cela m’avait amené à réunir quelque 300 légendes fantastiques d’Ardenne, qui donnèrent naissance à mon Dictionnaire des Légendes de l’Ardenne fantastique. Quelque temps plus tard, lors d’une exposition à Spa, je rencontrai une ancienne élève, Nathalie Chaballe, qui achevait des études d’illustration. Comme travail de fin d’études, elle devait présenter la maquette d’un ouvrage traitant des légendes bretonnes. Elle manquait de textes ; moi, au cours de mes recherches pour le Dictionnaire, j’avais trouvé que des rapprochements étaient à faire entre les deux domaines. J’écrivis donc quelques chapitres pour que Nathalie ait une matière suffisante pour son projet. Peu après, un ami commun, Camille Bellaire, me mit en rapport avec Jean-Pierre Lambot, à qui l’éditeur Pierre Mardaga venait de demander de lancer la collection « Mythes, Légendes et Traditions ». Jean-Pierre souhaita que je termine le manuscrit et je demandai à Nathalie d’en compléter l’illustration. L’ouvrage parut en 1989. Les tout derniers exemplaires dont je disposais ont été vendus lors du Printemps des Légendes. La collection et son éditeur n’existant plus, je souhaite évidemment qu’une nouvelle édition soit réalisée, d’autant plus qu’Hervé Gourdet et Olivier Rime m’ont fait le plaisir de me dire que c’est cet ouvrage qui, pour eux, avait déclenché le mouvement dont le Printemps des Légendes est un des fleurons.

    L’Ardenne (surtout belge) semble plus axée sur la sorcellerie. D’où vient cet attachement, ce goût prononcé pour les sorcières en Wallonie ?
    L’Histoire veut que de très nombreux procès de sorcellerie aient eu la Wallonie et particulièrement l’Ardenne pour cadre, principalement durant la seconde moitié du XVIe et au XVIIe siècle. Les pouvoirs spirituel autant que temporel étaient concernés, surtout qu’une bonne (et parfois lointaine) partie du territoire dépendait de la Principauté épiscopale de Liège ou de la Principauté abbatiale de Stavelot. Le contexte de la Contre-Réforme (Concile de Trente, 1545-1563), mais aussi une économie essentiellement agricole, dans uns société fondée sur un modèle masculin hérité du droit romain relayé par le droit canon, sont des éléments importants pour comprendre combien, alors que la peur du diable était constante, on cherchait des responsables à tout événement négatif. Les femmes, surtout si elles étaient seules ou un peu marginales, étaient des proies faciles dans une procédure aussi cruelle que sommaire. C’est pourquoi je crois que nous avons un devoir de justice et de mémoire vis-à-vis de tant de victimes innocentes et que je m’insurge contre le rôle horrifique, caricatural ou comique que l’on fait jouer aujourd’hui aux sorcières à travers les médias. Je trouve tout aussi inadmissibles les « fêtes » qui consistent à traquer les sorcières et à les brûler sur un bûcher autour duquel on danse.

    Vous qui aimez les comparaisons, que pensez-vous de celle de la sorcière et de la fée ? Ont-elles des points communs, la sorcière serait-elle une « mauvaise fée » ?
    Il y a des endroits où l’on ne sait pas distinguer vraiment la fée de la sorcière. C’est le cas, par exemple, de Namousette du côté de Dohan, mais aussi d’une manière plus large en Picardie. Il faut cependant savoir que, en Ardenne particulièrement, les aires peuplées de fées et celles des nûtons, sotês et autres massotês s’excluent généralement, sauf sur leurs frontières. Ces êtres légendaires ont d’ailleurs des rôles et des tailles assez semblables. Mais les sorcières, elles, on les trouve indistinctement dans les deux aires. Les connaissances empiriques que sorciers et sorcières pouvaient avoir des plantes, par exemple, dépassant souvent le savoir des médecins reconnus, les rendaient suspects, même si ces connaissances avaient rendu des services à la communauté. Nains et fées ont souvent été diabolisés dans les mêmes circonstances, parce que différents, eux aussi. En ce qui concerne les sorciers, il n’est pas inutile de constater que, dans l’Ardenne septentrionale et le Condroz, le berger-sorcier, tel que Bellem, sait rendre de précieux services, alors qu’en Ardenne méridionale, c’est plutôt le type du sorcier méchant qui prédomine, à l’image de Cape (ou Kaap) d’Herbeumont, précurseur peut-être du Gargamel des Schtroumpfs.

    Vous avez participé au festival Printemps des Légendes, à Monthermé. Y a-t-il selon vous un regain d’intérêt pour la féerie, vu le succès de ce festival ? Comment l’expliquer ?
    Il est sûr que la féerie se porte bien à l’époque actuelle, notamment parce que, sans que le public en soit toujours conscient, elle a aujourd’hui le soutien d’une technologie des effets spéciaux extrêmement sophistiquée qui a relancé l’intérêt pour des œuvres littéraires faisant appel à l’imaginaire et au fantastique. Pour moi, il y a cependant un danger dans cette vogue, c’est qu’on y mélange tout et n’importe quoi et qu’on risque ainsi de perdre ce que le quotidien peut nous offrir de merveilleux quand on veut bien y porter un regard attentif et nullement blasé. Je crois qu’il faut tirer la leçon de ce qu’on a fait d’Halloween en le réimportant des Etats-Unis : une manœuvre commerciale mêlant dans une célébration de l’horreur et de la laideur une série d’éléments – revenants, vampires, sorcières, araignées, etc. – qui n’ont au départ rien en commun, sinon de vider complètement de son sens profond la très intéressante fête de Samain, moment capital dans l’année des Celtes.

    Lors du débat-conférence qui s’y est tenu, vous avez fait part de vos rencontres avec Indiens et chamanes. Peut-on parler d’une universalité des mythes, légendes ?
    Il y a, me semble-t-il, au-delà de thèmes propres à telle ou telle région, une réelle convergence de mythes qui s’expriment par des légendes à travers de l’humanité.
    Pourquoi ? Eh bien, parce que l’être humain, où qu’il se trouve, a rencontré des situations semblables, que ce soit pour sa survie physique ou mentale. Les réactions sont fondamentalement identiques, parce que forcément humaines, les différences s’inscrivent alors dans la forme, en fonction de la culture – climat, géographie, ressources, mode de vie, etc. – de chaque société. On touche donc là ce qui est le fond commun de l’Humanité. Cela peut aller loin, sinon comment expliquer que l’on retrouve, par exemple, dans les légendes d’origine des Indiens Hopis, l’équivalent du déluge ou de Babel ?

    Pour notre propos qui est le Petit Peuple, la féerie, avez-vous rencontré lors de vos voyages des êtres proches du peuple féerique celte que l’on connaît mieux ici que tout autre ?
    Il faut bien se rendre compte que, dans notre Europe occidentale, il n’y a plus guère de lieux qui n’aient été exploités par l’homme. Nos forêts sont des jardins en comparaison de ce qu’était la forêt primaire, qu’on peut sans doute encore retrouver partiellement en République tchèque. Mais il reste des lieux « chargés ». J’ai éprouvé la même vibration au centre du labyrinthe de la cathédrale de Chartres et dans le village indien de Betatakin, abandonné depuis 1300 dans une arche de falaise en Arizona. Dans la forêt de Brocéliande et en d’autres lieux de Bretagne, de telles « présences » sont sensibles également. Et j’apprécie beaucoup le témoignage de José Gualinga, Indien kichwa d’Amazonie équatorienne, fils d’un très grand chamane de Sarayaku, qui, dans la forêt d’Ardenne, a encore ressenti de lointaines présences, même si cette forêt a été largement travaillée par l’homme. Y a-t-il là un héritage des Celtes ? On peut l’espérer. Un élément légendaire d’origine celtique resté vivace est assurément la Bête de Staneux. Je crois aussi que le caractère ardennais et wallon, volontiers rebelle et fier de sa « tribu », relève aussi de ce héritage.

    Vous êtes également l’auteur d’un Dictionnaire des légendes de l’Ardenne fantastique aujourd’hui épuisé. Cet ouvrage sera-t-il bientôt réédité ?
    Il est paru en 1984, avec des rééditions et 1985 et 1986 et est donc épuisé depuis longtemps. Un éditeur est prêt à le publier à nouveau, mais j’estime que je dois le refondre et le compléter largement, car, bien évidemment, beaucoup de choses sont venues à ma connaissance depuis lors et méritent d’être diffusées. Il faut que je trouve le temps de mettre tout cela au point.

    Quelle est votre créature féerique préférée et pourquoi ?
    Les êtres légendaires ne manquent pas dans la région de Theux, où j’habite : les Sotês, le Verbouc du château de Franchimont, la Chèvre rouge, …, mais ce qui l’emporte, pour moi, j’y reviens, c’est le Bête de Staneux, un centaure femelle, qui pourrait être Arduina, romanisée en Diane chasseresse (elle porte un arc et des flèches). Elle vivait dans le Bois de Staneux, entre Theux, Polleur et Spa, derrière chez moi, et diabolisée, elle fut rendue responsable de tous les événements malheureux qui se produisaient dans les environs, à part peut-être les incendies, provoqués, eux, par la Chèvre rouge. Un jugement de 1476 fait encore allusion à la Bête et sa légende est toujours extrêmement vivante dans les pratiques folkloriques locales.

    D’autres projets, actualités à signaler à nos lecteurs ?
    J’ai deux bouquins qui vont bientôt sortir. Le premier, prévu en mai à L’Enseigne du Chat Volant (Verviers), s’intitule Traditions légendaires et croyances populaires en Haute Ardenne. C’est l’adaptation française d’une thèse présentée en 1938 à l’Université de Bonn par Willy Marichal sur base d’un impressionnant collectage que, en 1936-1937, il avait réalisé en wallon dans les villages situés de Sourbrodt à Vielsalm. On est là devant un travail remarquable autant par la matière du collectage restée dans son aspect spontané que par la thèse proprement dite qui établit des comparaisons non seulement avec les travaux de Sébillot, par exemple, mais aussi avec les traditions de nombreux terroirs allemands qu’en général les francophones ignorent. L’autre livre doit sortir un peu plus tard chez Noir Dessin Production ; il s’agit de Nûtons, Sotês et autres Sarrasins de Wallonie et d’Ardenne, une étude que j’ai pris grand plaisir à réaliser en m’attachant au rôle social et historique de ces petits personnages. J’ai essayé d’en faire un ouvrage original et truffé d’anecdotes dans la mesure où, sans entrer dans la fantaisie et en restant très accessible, j’y fais le portrait de notre Petit Peuple sur la base des collectages et recherches effectués depuis le XIXe siècle, mais aussi en étudiant les origines mythologiques et historiques des nains de nos légendes en qui se combinent des influences antiques, celtiques, romanes, germaniques et nordiques.

    Propos recueillis par le Peuple féerique en avril 2009.

Suivez les fées !

Abonnez-vous pour ne rien manquer...