Auteur/autrice : Richard Ely

  • L’Auberge du bout du monde – Patrick Prugne, Tiburce Oger, Editions Casterman

    L’Auberge du bout du monde

    Le premier tome de l’Auberge du bout du monde

    En août 2004, Tiburce Oger et Patrick Prugne nous gratifiaient d’un album plein de poésie nous plongeant dans une sombre auberge de Bretagne en l’an 1884 où un écrivain en mal d’inspiration allait recueillir un secret terrible.

    Edgar de St Preux est un écrivain venu chercher l’inspiration au bout du monde, plus précisément dans une vieille auberge de Bretagne. L’aubergiste, au seuil de la mort, lui conte alors l’histoire poignante d’Iréna, jeune fille disparue en 1822. L’assassinat de la mère de la disparue et la réapparition d’Iréna des années plus tard sont au cœur d’une tragédie insoupçonnée qui frappera le village de Trébernec, aujourd’hui vidé de ses habitants.

    Le scénario de Tiburce Oger est magnifiquement ficelé. Le romantisme mêlé à la tragédie constitue un fond solide à cette histoire où le dessin de Patrick Prugne apporte la forme adéquate. On ressent une forte complicité entre les deux auteurs comme le dessinateur nous le confirme : « Pour ce qui est de la rencontre avec Tiburce, cela s’est fait par le plus pur des hasards. En 1990, j’obtiens le Prix Avenir à Angoulême, Tiburce obtient ce même prix l’année suivante. Nous devions donc nous rencontrer! Merci le Festival. Depuis, nous avons toujours gardé d’étroits contacts et avons toujours eu envie de travailler ensemble jusqu’au jour ou ce souhait s’est réalisé avec l’Auberge du bout du Monde. Je reconnais qu’avant tout, cette histoire est écrite pour moi, c’est vraiment du « sur mesure » que m’a écrit Tiburce. C’est vraiment une pièce d’orfèvrerie ».

    L’histoire baigne dans un siècle de légendes et de contes fantastiques. Ici aussi, le dessinateur parvient à construire le décor idéal « Le jour où j’ai découvert l’histoire, je me suis vraiment senti plonger dans cette atmosphère rurale du 19ème. J’ai retrouvé la même sensation que dans les romans de Dickens ou Stevenson où les ambiances collent à la peau et où il ne manque même pas l’odeur. C’était donc à moi d’essayer de retranscrire toutes ces émotions sur du papier aquarelle… La musique du film en quelque sorte ». Un dessin réussi, qui par l’ambiance, les décors, les créatures mystérieuses, presque invisibles, vient épouser le charme incontestable des deux héros. Patrick Prugne : « A propos du charisme de Yann et Iréna, il vient justement de leur amour et puis ça, c’est le côté romantique de Tiburce, le vrai, celui qu’engendre souvent la douleur… ». Et c’est bien de douleur qu’il s’agit ici. Les deux auteurs ont réussi à signer une œuvre forte, marquante. Une belle tragédie flirtant avec le petit peuple légendaire.

    Patrick Prugne a refusé de nous dévoiler le moindre élément du tome 2. Qu’importe, en février prochain, nous serons aux premières loges pour écouter la suite du récit du vieil aubergiste et suivre de près le destin d’Iréna et de Yann !

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  • Ellezelles, village de l'étrange

    Une oeuvre de lartiste Watkyne, créateur du sentier de létrange à Ellezelles
    Une oeuvre de l'artiste Watkyne, créateur du sentier de l'étrange à Ellezelles

    Petit village perdu dans le Hainaut, à la frontière linguistique séparant la Wallonie francophone de la flandre néerlandophone, Ellezelles est riche de légendes, de paysages fabuleux et de promenades insolites.

    Ellezelles est un village de 3000 habitants, situé en Belgique, dans le Hainaut près de la ville d’Ath. La particularité de ce village est son folklore qui lui vaut d’être connu jusqu’au dehors des frontières belges. Un folklore qui a été spécialement développé par une des figures marquantes de sa population: l’artiste-peintre Watkyne, de son vrai nom Jacques Vandewattyne, qui nous a malheureusement quitté il y a peu, en juin dernier. Ellezelles tire son folklore de son passé mais surtout de légendes réactualisées.

    Le Village perdu dans le Pays des Collines fut le témoin des brigandages du célèbre Sandôu, il vit s’élever et tomber bon nombre de forteresses et de châteaux (Château d’Hubermont, château de Nieubourg, château des Comtes, ce dernier fut habité par le Comte Lamoral d’Egmont qui fut décapité sur la grand-place de Bruxelles avec le Comte de Hornes en 1568).

    Ellezelles est un village où le folklore fait honneur aux artisans et à la nature par son superbe Ecomusée. Village où « Les moulins tournent encore… » comme le Moulin du Cat Sauvage, qui déploie ses ailes et nourrissait de ses fruits une populace encore aujourd’hui bien sympathique.

    Village, enfin, hanté de légendes et de contes anciens. …Où, quelquefois, sous la pâleur de la pleine lune, on voit voler des ombres singulières. Toutes ces ombres se rendent avec furie au Sabbat où les attend leur maître.

    Ces ombres ne sont rien d’autres que des… SORCIERES !

    Un nom: Watkyne !

    Jacques Vandewattyne a lancé en 1974 le manifeste du Folk Art. Les revendications du mouvement artistique étaient la mise en valeur et la transmission des traditions populaires. Sculpteur, conteur, peintre, restaurateur, Watkyne (pseudonyme de l’artiste) a contribué toute sa vie à la renommée folklorique de son pays d’Ellezelles. Il est l’initiateur de la première foire aux artisans (1970), concept repris depuis par l’ensemble de la région. C’est lui qui y fit revenir les Sorcières en 1972, attribuant par là à Ellezelles la marque de l’Etrange. C’est lui aussi qui permit au moulin du Cat Sauvage de faire tourner à nouveau fièrement ses ailes. Depuis 1984, un mystérieux sentier a vu le jour, parsemé des œuvres diaboliquement bien réussies de Watkyne. Si, aujourd’hui, Ellezelles a cette renommée fantastique, c’est certainement grâce à ce passionné de traditions que certains prétendent avoir vu courir en tête des sorcières au Sabbat. Mais ne faut-il pas être un peu sorcier soi-même pour faire naître et renaître tant de choses ?

    Ellezelles, un pays fantastique…

    Outre les activités folkloriques qui continuent de se manifester aujourd’hui, le village d’Ellezelles est principalement connu pour son cadre étrange, pour ses paysages de collines parsemées d’arbres-têtards et de masures inquiétantes, et pour sa bière Quintine, dont le nom n’est autre que celui d’une sorcière condamnée en 1610.

    Ellezelles est également le lieu d’inspiration de nombreux artistes, peintres et écrivains. De nombreuses expositions autour de thèmes réalistes mais également imaginaires ont lieu au village. Parmi tous les artistes citons le nom de Christian Pieman, élève spirituel de Jacques Vandewattyne et continuateur de son œuvre lorsque ce dernier peint avec talent de terribles scènes de sorcellerie.

    Et depuis 1996, c’est également à Ellezelles que se trouve notre Association Anthêsis dont l’objet principal est de promouvoir les auteurs fantastiques…

    Ainsi, peinture, littérature, sculpture…Tous les arts de l’Etrange se rassemblent en un lieu magique protégé de collines boisées et baigné dans une atmosphère propice aux créations les plus inquiétantes…

    Le sentier de l’étrange

    C’est en 1984 que fut inauguré un sentier de promenade à Ellezelles qui vaut le détour. Parsemé des œuvres de Jacques Vandewattyne, le sentier traverse le village et nous fait découvrir curiosités historiques et folkloriques. On peut y rencontrer un diable au violon, qui, dit-on, les nuits de pleine lune fait danser toutes les créatures de fer et de pierre, les entraînant dans une ronde infernale… Ailleurs, on découvre un sympathique petit Hercule Poirot (il paraît que ce dernier serait né dans la localité…), la célèbre sorcière Quintine, qui effleurée en prononçant la formule magique « Houp, houp, riki, rikète, padzeur les haies èt les bouchons vole au diâle èt co pu lon »réalisera tous vos vœux (bien entendu, la formule est à prononcer avec l’accent!). Enfin, vous irez encore à la rencontre des Sylphes, d’un vert bouc, etc. Sans oublier la fameuse « Eul Pichoûre », une affreuse sorcière qui nous joue bien des tours! Glissez une petite pièce dans la boîte à ses côtés et vous aurez une bien mauvaise surprise…trempée! Le sentier vous invite également à consommer la bière Quintine avec un bon morceau de tarte à maton. C’est là une occasion unique de parcourir la campagne, d’y voir se dévoiler à nos yeux de superbes vues du village et de ses environs. Et quel plaisir de retrouver à quelques endroits ces étranges personnages sculptés qui mettent une touche insolite à cette promenade !

    Une promenade unique en son genre qui attire de nombreux curieux et laisse toujours une impression agréable.

    On n’oubliera pas de repartir dans nos foyers en emportant des produits régionaux ou des sorcières faites de bois et de chiffons, qui, une fois installées sur notre cheminée, nous rappellerons ce pays bien étrange. Surtout, on n’oubliera pas ces arbres aux formes humaines, les chokes, arbres-têtards, qui parsèment la campagne ellezelloise et lui donnent un aspect unique. On se rappellera la gentillesse des habitants et leur attachement tout particulier pour un folklore unique en son genre. Et on n’oubliera certainement pas la personne qui fut au centre du développement de ce folklore, celle par qui tout arriva, qui donna à Ellezelles ses curiosités et ses plus belles manifestations folkloriques. Non, Monsieur Vandewattyne, on ne vous oubliera jamais.

    A noter également que Nienna a fait une partie de ses photos de son livre « Forest Faeries » dans le village d’Ellezelles et le long du sentier de l’étrange. Découvrez en plus sur ce livre sur le site de la collection Estragon

  • Pierre Dubois l'elficologue

    Pierre Dubois

    L’elficologue

    Lencyclopédie des fées de Pierre Dubois
    L'encyclopédie des fées de Pierre Dubois

    Né en 1945 dans les Ardennes, Pierre Dubois partage sa vie entre ses demeures du Nord et de Bretagne. Cela, lorsqu’il ne se promène pas de l’autre côté du miroir. Car l’homme est ami des fées et nous rapporte nombre de récits et anecdotes sur le Petit Peuple. Que ce soit au travers de ses célèbres encyclopédies ou au travers de ses bandes dessinées (Laïyna, les Lutins, Red Caps, le Grimoire du Petit Peuple…), l’auteur nous enchante au fil de ses publications. Petites questions au Maître elficologue…

    Pierre Dubois, d’où vous vient cette passion pour le Petit Peuple et la féerie ?

    Elle me vient, je crois, de l’enfance contemplative, l’enfance solitaire. C’est très souvent lorsque l’enfant se retrouve seul, comme Nils Holgersson qui fera une bêtise et sera puni par un Tomte… Enfant, je jouais dans la buanderie, endroit intermédiaire entre le jardin et la cuisine. Il y avait ce poêle qui ronflait et, par souci d’économie d’électricité, on levait le couvercle, ce qui donnait une lumière particulière, proche de celles des cavernes. Ce feu crépitait et dansait sur le plafond comme une espèce de lanterne magique. Moi, j’y voyais des nains forgeant des épées, des trolls, des fées… Et puis il y avait le reflet de l’eau qui amenait le jardin… Une lézarde sur le mur me donnait l’idée qu’elle menait quelque part. Moi, je venais des Ardennes, grande forêt de légendes. Mes parents m’avaient entraîné dans le Nord et du coup, il y avait cette absence de forêt. J’étais perdu de forêt. Cette forêt, je l’ai retrouvée dans le jardin. Et à force de jouer dans le jardin, seul, tour à tour chevalier, Robin des Bois… Tout est né de là.

    Aujourd’hui, on assiste à un retour aux fées… Comment l’expliquer ?

    La mythologie est avant tout universelle. C’est l’explication de la création du monde. Nous conservons donc cette grande mythologie en nous. La petite mythologie, les fées, les nains, ce sont ces grands dieux qu’on a un peu pervertis. Pan ou Cernunnos sont devenus le diable. Toute la culture des fées a été, en même temps que les forêts, déboisée. On a désacralisé la Nature pour essayer de la domestiquer. Mais les fées sont rebelles. Des folkloristes comme les frères Grimm, Andersen, un auteur comme Tolkien, ont puisé dans ces mythologies. Mais il y a toujours eu cette mainmise du pouvoir afin de tuer cet émotionnel, cet imaginaire. Pour qu’on rentre tous dans « Metropolis ». Et il y a toujours eu un réflexe. Alors qu’on croyait les ailes des fées rognées, les jeunes, par l’intermédiaire des mangas, de la BD, des films, des fanzines, du jeu de rôle, de la musique prennent en main leur destin. Un festival comme aujourd’hui (NDLR: Trolls & Légendes, Mons) est extrêmement positif, rayonnant, du fait qu’on voit plein de gens costumés, des personnes qui jouent encore…

    Un retour à la terre ou à la poésie ?

    L’un ne va pas sans l’autre. Mais il ne faudrait pas que ce soit une mode. La vraie magie, le vrai merveilleux, tu dois le porter en dedans. Cette espèce de débauche du contenant ne doit pas faire oublier le contenu. J’ai un peu peur parfois que les effets spéciaux ne remplacent la magie, remplacent la petit musique des fées, de l’âme. Le passage des fées, celui d’Alice, du petit Arthur, est un chemin éthéré, fragile. Il faut faire très attention.

    Parlons de vos encyclopédies. Elles sont très complètes. Mais en même temps on y perçoit des incrustations personnelles. Pour vous, c’est important de ne pas être trop sérieux. De ne pas ranger les fées dans des tiroirs fermés à clés ?

    C’est bien pour ça que, dans la préface de l’encyclopédie, je dis: « voilà, c’est fait et en même temps, toutes les portes sont ouvertes ». Il faut toujours laisser une part aux fées. Autrefois, lorsqu’on labourait un champ, on laissait un coin pour que les fées puissent s’ébattre. Si tu es exaucé, c’est qu’ils ont accepté, il y a eu alliance. Quand j’ai écrit mes bouquins, je me suis mis du côté des fées. Dans toutes les préfaces, je le dis. Maintenant, le mot encyclopédie ne me plaisait pas non plus. Je préférais Grimoirie. Ma démarche est née parce que je voyais des gamins chercher de manière anarchique des infos sur les fées. J’ai voulu tout reprendre à zéro et donner des pistes à peu près sûres. Rêvez avec, amusez-vous, voilà tout au moins des bases, voici le Brownie, voilà les Selkies, le Sotê… J’ai eu envie de revenir aux sources.

    La dernière encyclopédie parue est celle des elfes. Vous les qualifiez d’êtres fuyants…

    Une phrase de Bachelard que j’apprécie beaucoup dit « Les petits êtres fuyant et cachés oublient de fuir lorsqu’on les appellent par leurs vrais noms ». Ces petits êtres fuient l’homme. Ce que disent les elfes, c’est si vous jetez des immondices dans l’eau, vous empoisonnez les Dracs, les Sirènes, les Morganes, tout le peuple de la mer mais nous vous empoisonnerons. Si vous construisez tout en haut des cimes, sur les épaules des trolls, ce sera trop lourd et il y aura des avalanches. Il y a une forme d’écologie dans ce message. Il faut garder cette espèce de jardin secret.

    En même temps, qu’est ce qui distingue les membres du petit Peuple regroupés dans la famille des elfes, de la famille des fées ou de celle des lutins ?

    Cette répartition ne vient pas de moi. Moi, je désirais un seul Grimoire. J’avais commencé à écrire mes bouquins sur du parchemin à la plume d’oie. C’est sorti en 93 mais j’ai commencé en 67 et j’avais déjà collecté pas mal de choses auparavant. Je cherchais un éditeur, personne n’était intéressé jusqu’au jour où quelqu’un me contacte avec une vague idée de faire un bouquin sur les fées alors que moi je voulais faire quelque chose d’énorme, pratiquement vendu avec les toiles d’araignée et la poussière dessus. Finalement Hoëbeke a pris le risque mais en scindant l’œuvre en trois. Dans la première encyclopédie, tout ce qui est petit, chtonien… Et cela s’est vendu à 80.000, 90.000 exemplaires, traduit même en japonais ! On a donc fait le suivant. Celui sur les fées, la femme, la sorcière, symbole de sagesse, de la Nature… Tout ce qui est féminin me fascine. C’est aussi l’époque où je venais de perdre ma fille de dix-sept ans… Pour moi, l’encyclopédie des fées m’a échappée, ce n’est pas moi qui l’ai écrite, on me l’a soufflée. Elle a été écrite plus facilement mais aussi plus douloureusement que la première. La troisième, les elfes, c’est la partie obscure et sauvage, les êtres insaisissables et fuyants. Les elfes ont le droit de nous décocher des flèches vengeresses. Les elfes sont vraiment, pour moi, la part la plus sombre, sauvage et vengeresse.

    Parlons bande dessinée maintenant… De Laÿna aux récents Grimoire du Petit Peuple, en passant par Les Lutins et Red Caps, on note une certaine noirceur dans les récits…

    C’est la première fois qu’on me le dit et c’est totalement vrai. C’est une lutte de chaque jour, l’idée qu’il faut réenchanter à cause de cette trahison que le mortel porte en lui. Il a la possibilité chaque jour de changer les choses et il fait l’inverse…

    En même temps, vous placez souvent le Petit Peuple en arrière-plan dans vos histoires, il reste caché et toujours présent…

    Et bien cette idée, ni les éditeurs, ni même mes dessinateurs ne l’ont réellement compris. J’ai eu l’impression d’être lâché par mes dessinateurs sauf Sfar. Lui, il a complètement saisi la chose. On le ressent dans Petrus Barbygère. Là, c’est bien moi, Pierre le Barbu ! Tous mes héros qui font alliance perdent, c’est une fatalité, une blessure. Et cette blessure, je la porte en moi. Mes bandes dessinées ne sont pas au premier degré, je suis un peu en décalage. Il y a beaucoup d’écrit par exemple. Moi, ce sont les images d’Epinal que j’apprécie, je désire une BD pleine de merveilleux mais aussi de sang, de crimes et d’aventure !

    Avec le Grimoire du Petit Peuple, vous renouez avec cette envie de travailler avec de nombreux dessinateurs. On soulignera d’ailleurs que vous n’avez jamais hésité à prendre sous votre aile de jeunes talents. Les choisissez-vous, viennent-ils à vous ?

    Pour le Grimoire, je ne choisis pas les dessinateurs, c’est l’éditeur qui s’en occupe. Mais je demande des jeunes, ça oui. Je veux voir leur carton à dessins, voir ce qu’ils ont dans la tête. J’aime voir ce que font les autres mais je demande seulement qu’ils respectent les idées, les époques, les lieux avec leurs caractéristiques, faune et flore.. Il faut toujours bien se documenter.

    Pourtant, l’apport personnel de sa vision du Petit peuple aide à ne pas fixer son image…

    Bien sûr ! J’aime bien que chacun apporte sa propre vision. Ils doivent continuer à fuir… Là, je ne suis absolument pas directif. Je fais confiance au dessinateur. Mon histoire même a peu d’importance, ils peuvent enlever des séquences. C’est seulement quand ça nuit à l’histoire que cela m’embête.

    L’année passée est sorti le Jardin Féerique de Cicely Mary Barker…

    Elle aussi a eu une enfance solitaire. Seule, malade, bloquée dans sa chambre, elle va s’évader par le dessin. Son père va lui offrir des cours par correspondance…Mary va habiller en fleurs les enfants de la nurserie de sa soeur et va les dessiner. Ce qui est extraordinaire, c’est quelle semblera ne pas vieillir. Et alors qu’elle deviendra aveugle, elle continuera à distinguer les fleurs, les jacinthes.. et ça, pour moi, c’est le regard des fées sur elle.

    Vous avez aussi inspiré à Loisel son Peter Pan, du moins l’idée de mêler Jack l’éventreur au héro de Barrie…

    Ma passion pour les criminels, les pirates c’est le côté obscur. La Nature a également ce côté obscur… J’ai écrit un bouquin sur Jack l’éventreur et me suis toujours interrogé sur la relation entre Peter Pan et le tueur de Whitechapel. Peter Pan est habile à la dague. Clochette, une parfaite complice pour surveiller les alentours. Venant de Kensington Garden pour se rendre à la maison des parents de Wendy, il passe nécessairement par Whitechapel. Et à ce moment-là, les seules femmes que tu peux rencontrer sont justement des prostituées. Restait le mobile… Peter Pan cherche dans le ventre de la femme la mère, il veut une explication. C’est encore un enfant. Pourquoi les filles, les femmes l’abandonnent? Pourquoi Wendy préfère vieillir que de rester à ses côtés ? Je racontais cela à Loisel venu en ami dîner chez moi, en Bretagne. Il travaillait sur Peter Pan et désirait explorer la face sombre. Il avait vu le dessin animé de Walt Disney et avait été frappé par le côté faune de Peter. Il m’a demandé s’il pouvait reprendre mon idée et ce qu’il en a fait me plaît énormément. Tu y rencontres un personnage sombre, qui se perd. Et c’est là qu’on rejoint le monde des fées. Car pour trouver le passage, il faut se perdre.

    Vous dites dans une de vos interviews avoir été tristement épaté par les universitaires…

    Car ils épluchent sans rêver, ils décortiquent mais oublient d’y poser le regard. Il manque un écrivain derrière le savant. Maintenant, ils font un travail de fourmi, qui m’épate et je suis totalement pour qu’on étudie les fées à l’université !

    Il est important de se réenchanter, de retrouver le sens du merveilleux. L’enfant naît ouvert aux rêves, aux fées. Mais ces croyances seront arrêtées, on arrachera les ailes des fées à un moment donné, vers six, sept ans… Or, l’enfant lui-même devenu père lorsque sa progéniture lui demandera de dessiner une fée, il ne pourra que reproduire celle de ce souvenir arrêté. Il y a un manque émotionnel. Quand un enfant veut faire de la musique, c’est en option à son Bac. Notre planète ne pourra être sauvée qu’à la condition de réenchanter notre regard.

    Enfin, pour rencontrer les fées, vous conseillez de les lire ou de les vivre ?

    De les vivre. Franchir le pont, le miroir… Mais aussi de les lire, les lire à la base. Si on veut s’approcher des fées, il faut lire les contes, ou les entendre et les écouter. Il faut retourner à la base, au révérend Kirk. Il faut d’abord vivre pour lire, vivre ça t’oblige à faire ces fameux trois pas, à réciter cet Abracadabra.

  • L’Univers des Dragons – Daniel Maghen

    L’Univers des Dragons
    Daniel Maghen

    Une fois de plus, la galerie Daniel Maghen s’est attaqué à l’édition d’un bel objet. L’univers des Dragons réunit de magnifiques ilustrations pleine page d’Olivier Ledroit, Jean-Babptiste Monge, Jerôme Lereculey, Civiello, John Howe et une vingtaine d’autres artistes parmi les meilleurs en fantasy. Les textes sont signés Monge, Moguérou, Laurent et Olivier Souillé et vous proposent de vivre des histoires d’hommes et de dragons. Des tableaux qui se succèdent et nous émerveillent.

    Une mise en page des plus soignées et quelques surprises achèveront de convaincre tout amateur de ces créatures aux divines écailles de se procurer l’ouvrage. A noter qu’il s’agit d’un premier tome, le second étant annoncé pour fin de cette année 2008 !

  • Sur la piste des dragons oubliés – Troisième carnet

    Sur la piste des dragons oubliés – Troisième carnet
    Au Bord des Continents

    Troisième carnet de ce mystérieux auteur qu’est Elian Black Mor. Sur la Piste des dragons oubliés est d’abord un somptueux travail graphique qui allie de superbes illustrations de ces fascinantes bêtes légendaires que sont les dragons à une mise en page des plus élaborées. C’est donc un véritable petit bijou graphique et un objet-livre des plus réussis que nous offrent les auteurs Patrick Jézéquel et Carine_m.

    En plus de ce pur plaisir des yeux, les esprits sont également gâtés par les détails et le récit de l’aventurier offrant à nos coeurs l’espoir de croiser un jour un de ces dragons dont parlent les carnets.

    Pour un aperçu de ces voyages extraordinaires ou pour prolonger le plaisir des livres, un site est disponible: www.elian-black-mor.com

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