Étiquette : Encyclopédie du Merveilleux

  • Interview d’Isabelle Lerein, éditrice au Pré aux Clercs

    Cette année, le Peuple féerique s’est penché sur ces acteurs de la féerie que sont les éditeurs. Nous terminons notre petit tour d’horizon avec les éditions Le Pré aux Clercs et Isabelle Lerein qui a bien voulu répondre à nos petites questions…


    Votre catalogue s’est teinté ces dernières années de féerie. A quoi  est dû cet intérêt pour l’imaginaire féerique, notamment l’idée des  encyclopédies d’Edouard Brasey et leurs dérivés ?

    Nous avons commencé à développer la fantasy illustrée au Pré aux Clercs à une époque où seuls quelques éditeurs spécialisés publiaient des Art books d’illustrateurs. Les magnifiques encyclopédies de Pierre Dubois étaient sur le marché depuis déjà quelques années. Il y avait une place à prendre. Edouard Brasey a bien voulu relever le défi.

    Le premier tome de l’Encyclopédie du merveilleux est sorti fin 2005. Le succès  a été immédiat. Les produits dérivés se sont inscrits naturellement dans le sillage de cette première publication.

    Quel a été votre meilleure vente féerique jusqu’à présent ? Quel est le tirage moyen des encyclopédies féeriques ?

    La petite encyclopédie du merveilleux. 30 000 exemplaires vendus à ce jour.

    Tirage moyen : 10 000 exemplaires.

    Ressentez-vous un interêt grandissant pour le genre chez vos lecteurs ? D’ailleurs qui sont vos lecteurs? Ont-ils un profil-type ou non ?

    Depuis quelques années l’intérêt est grandissant et le genre moins « décrié » grâce aux succès commerciaux de Harry Potter et Eragon. Il n’ y  a pas de profil type même si le coeur de cible reste les 15 – 35 ans. Beaucoup de femmes de 50 ans et parfois plus adorent le travail de Sandrine Gestin sans pour autant lire de la fantasy classique. Les fans d’Edouard Brasey viennent d’horizons différents. L’offre s’étant étoffée, le public s’est diversifié.

    Et pour vous, personnellement, quelle est votre créature féerique préférée et pourquoi ?

    J’aime les fées parce qu’elles ont le pouvoir de transformer le réel. Je n’en aime pas une en particulier, je les aime toutes.

    Avec la rentrée, les ouvrages féeriques seront à nouveau d’actualité pour nous mener vers les fêtes de fin d’année où les fées sont reines. Que nous réservez-vous pour les mois à venir ?

    Nous sortons en ce mois de septembre deux calendriers : d’une part et pour la quatrième année consécutive Le Calendrier des Fées de Sandrine Gestin et, une nouveauté un calendrier signé Didier Graffet, Le Calendrier fantasy.

    Nous publions également au mois de septembre L’Agenda merveilleux 2010, une réalisation d’Edouard Brasey pour les textes et de Sandrine Gestin pour les dessins et la maquette.

    Enfin, au mois d’octobre, notre beau livre de fin d’année : L’Encyclopédie des héros du merveilleux. Textes d’Edouard Brasey, illustrations de Didier Graffet et Sandrine Gestin. Enluminures Alain-Marc Friez.

    Propos recueillis par le Peuple féerique en septembre 2009

  • Rencontre avec Edouard Brasey, le chasseur de fées…

    En quelques années Edouard Brasey est devenu la référence incontournable en matière de Féerie. Depuis sa première Enquête sur l’existence des Fées et autres esprits de la Nature (Editions Filipacchi) en 1996, il n’a eu de cesse d’enchaîner les publications sur le Merveilleux et la féerie. Ses encyclopédies parues au Pré aux Clercs sont un réel succès et la préparation d’un certain « Traité de Féerie » fait beaucoup de bruit sur le net. Nous l’avions déjà soumis à nos questions il y a quelques temps. L’occasion s’est représentée pour une interview un peu plus longue sur les fées et autres petites créatures féeriques. Rencontre avec un chasseur de fées…

    Le peuple des fées résulterait d’un croisement entre les divinités antiques apportées en nos régions par les romains et des mythologies celte et germanique. On peut y ajouter le travail de modelage du Christianisme et vous soulignez dans vos ouvrages la réminiscence des anciennes druidesses. Alors, le Peuple des fées, finalement, que s’est-il passé avec son « image », d’où découle sa représentation actuelle ?
    Eh bien, jadis les Anciens croyaient aux fées comme à de petites divinités intermédiaires, des esprits élémentaires, que l’on pouvait rencontrer. Des « messagers » de l’Autre Monde, un peu comme les anges. Aujourd’hui, elles ont été infantilisées ; elles sont considérées comme de simples personnages de contes, alors qu’elles sont bien plus que cela !.

    Vous décrivez les lutins comme des êtres farceurs, parfois limite méchants. Ils sont responsables de tous nos maux comme les retards de trains par exemple. Ils se sont donc adaptés à notre vie moderne ?
    Bien sûr ! Les lutins ne sont pas foncièrement méchants, mais ils ne peuvent pas s’empêcher de tout mélanger, égarer les clés, créer mille petits problèmes. On leur impute même, dans le cas des gremlins, la responsabilité des bugs informatiques !

    Pensez-vous que l’énorme succès que connaissent les elfes aujourd’hui est du aux films du Seigneur des Anneaux, adaptés par Peter Jackson à partir de l’œuvre de Tolkien, et au fait que les elfes y apparaissent physiquement comme des humains sublimés ?
    Les elfes de Tolkien sont des descendants des Tuatha dé Danann d’Irlande, un peuple idéal, venu des îles enchantées du nord. Ils sont bien différents des elfes noirs germaniques, qui ressemblent davantage à des nains vivant sous terre, à des démons ou à des esprits des morts !

    Donc les elfes n’ont pas toujours eu cette image ultra positive. On peut d’ailleurs lire dans vos œuvres que les elfes sont à l’origine de nombreuses maladies (folie, urticaire, colique, lumbago, etc.) D’où vient ce lien ?
    Les elfes germaniques étaient redoutés ; ils étaient considérés comme un peuple sorcier pouvant jeter des maléfices. Les maladies incurables, notamment, étaient dues à leur malveillance. Il existait même des conjurations pour les éloigner !

    N’a-t-on pas largement adouci l’image des fées aujourd’hui ? Un travail commencé au XIIe et XIIIe siècle avec les contes de fées… Et ces douces amies ne sont-elles pas une vision très française du Petit Peuple ?
    Les fées d’aujourd’hui pâtissent d’une représentation stéréotypée – la fée à la baguette magique qui résout tous les problèmes – qui remonte surtout aux fées de cour du XVIIIe siècle français, et aussi aux fées infantiles des dessins animés de Walt Disney… La fée Clochette est le résultat de cette évolution.

    Dans Le guide du Chasseur de fées vous dites que la fée est une femme idéale…
    Elle l’est ! En tout cas les chevaliers errants qui faisaient leur rencontre au détour d’un chemin, d’un bois ou d’une rivière tombaient immédiatement amoureux d’elles et les demandaient en mariage. C’est le cas de la fée Mélusine, par exemple, qui épousa le seigneur Raimondin dans le livre de Jean d’Arras.

    Vous écrivez aussi que « les fées vivraient dans l’Autre Monde. Elles seraient des anges féminins rejoints en leur Paradis par les humains dignes d’elles ». C’est une vision très spirituelle et mystique de la féerie ?
    Non, elle correspond à la mythologie celtique, qui voyait l’Autre Monde, le paradis, dans une île lointaine, Avallon, peuplée de fées sublimes. Les preux qui les y rejoignaient n’en revenaient pas, tant ils y étaient heureux… A moins qu’ils ne fussent morts… Pour le savoir, il faudrait y aller…

    Quel lien voyez-vous entre la Vierge Marie et les fées ?
    Le parfum ! Il s’agit d’un parfum de lis et de rose mêlés, que j’ai eu l’occasion de humer quelquefois… en particulier dans la grande salle de la Bibliothèque nationale de la rue de Richelieu à Paris !

    D’où vient la diminution de la taille des fées. Comment sont-elles passées d’une taille humaine à ces êtres ailés et minuscules ? Influence des elfes nordiques ? Shakespeare ?
    Shakespeare a en effet décrit Mab, la reine des fées, comme un être minuscule. Mais en réalité les fées ont diminué de taille au fur et à mesure qu’elles ont diminué dans les croyances des gens… Lorsque les hommes y croyaient et les aimaient d’amour, elles étaient grandes et belles…

    Comment expliquez-vous l’attachement de l’homme au dragon ? Ici aussi, on remarque une image très positivée d’une créature mythique autrefois liée au serpent d’Eden et au Mal…
    Le dragon est un monstre effrayant qu’il faut vaincre pour s’approprier le trésor dont il est le gardien ; il est une sorte de gardien du seuil, de créature initiatique. Il est aussi un très vieux sage issu du chaos originel. Et le cousin du serpent de la Genèse aussi, bien sûr…

    D’où vient l’idée des dragons gardiens de trésors ?
    En réalité, les richesses conservées par les dragons sont initiatiques : il s’agit de la sagesse, de l’illumination que l’on ne peut atteindre qu’en affrontant ses peurs ancestrales, ses démons intérieurs, son ombre, au sens où la définissait le psychologue Jung.

    Les sylphes auraient été perçus comme des extraterrestres au Moyen-Âge. Expliquez-nous un peu ça…
    On en trouve l’étrange récit dans un curieux ouvrage du XVIIe siècle, « Le Comte de Gabalis », écrit par l’abbé Montfaucon de Villars. L’auteur parle de sylphes, donc de créatures de l’air, mais il fait une description ressemblant parfaitement aux enlèvements extraterrestres !

    On croise souvent dans vos écrits des références à un certain Ismaël Mérindol. Comment expliquez que pour notre part, nous n’avions jamais croisé son nom auparavant ? Dites-nous en plus ce cet énigmatique personnage…
    Il s’agit d’un changelin, un enfant des fées, qui vécut entre 1400 et 1522, et à qui l’on doit ce fameux « Traité de Faërie » de 1466, incunable que j’ai eu la chance de consulter à la bibliothèque nationale de Prague il y a quelques années… Je vais d’ailleurs publier ce texte rarissime en avril prochain dans la collection de grimoires et traités que je dirige au Pré aux Clercs. Il y parle de ses rencontres avec les fées, les nymphes, les gnomes…. En annexe, je publierai également « Le Comte de Gabalis », déjà cité.

    L’Encyclopédie du Merveilleux brasse très largement l’univers légendaire en incluant en ses pages aussi bien les fées que les anges, les vampires que les djinns. N’est-il pas risqué de mélanger toutes ces créatures aux origines différentes ou est-ce là une façon d’épouser le légendaire d’aujourd’hui multiculturel et universel ?
    J’ai en effet intégré des créatures lointaines, voire exotiques, comme les djinns ou les zombies, mais qui ont été accueillies dans notre imaginaire fantastique, ne serait-ce que par les contes ou le cinéma. En revanche, j’ai laissé de côté les créatures trop différentes de notre culture, comme les dieux et esprits du shintoïsme par exemple, ou encore les dieux et démons africains.

    Combien d’ouvrages sur le Petit Peuple possédez-vous dans votre bibliothèque ?
    Je l’ignore ! Il y en a un peu partout ! Parfois je les perds, puis je les retrouve par hasard ! Les livres sont vivants, ils ont leur autonomie…

    « L’Imaginaire est comme une peinture. Le paysage réel existe, mais c’est la palette du peintre qui va le sublimer et en faire une œuvre d’art ». Expliquez-nous votre phrase…
    Tout dépend du regard que l’on porte sur les choses. L’artiste, le peintre, le poète, l’amoureux des fées a le pouvoir de réenchanter le monde par le regard « ravi » qu’il porte sur les choses. Il ne change pas le réel, mais son regard. Mais en changeant son regard sur le réel, le réel, par reflet, change à son tour…

    André Malraux disait que le XXIe siècle serait spirituel ou ne sera pas. Nous y sommes. D’après vous, ce siècle est un siècle hautement spirituel ?
    Parfois, on peut se poser la question ! Le bal des banquiers en déroute de l’actualité récente laisserait penser que nous avons replongé dans la matière la plus lourde… Et pourtant… Ceux qui s’intéressaient aux fées voici à peine vingt ans passaient pour des fous. Aujourd’hui, c’est devenu presque naturel. Peter Pan serait-il de retour parmi nous ? Je l’espère…

    Ces dernières années, les ouvrages féeriques se multiplient. Comment expliquez-vous ce retour aux fées ?
    Ce sont les bonnes marraines, les protectrices, les amantes désirées, les femmes idéalisées. C’est aussi un retour de la culture celte, qui avait une haute opinion des femmes. Une revanche de la féminité sur le machisme du siècle passé ?

    Vous avez entamé une nouvelle trilogie d’encyclopédies avec celles du légendaire. Une façon de mettre en avant des choses essentielles mais trop souvent reléguées à des secondes places comme les objets, les héros humains ou les lieux ?
    Oui, on parle peu des objets magiques, des artefacts, alors qu’il s’agit de vecteurs d’imaginaires extraordinaires… L’épée Excalibur, le chaudron de Dagda, le trésor des Nibelungen… Le tome second, sur les personnages légendaires, fera la part belle au roi Arthur et aux chevaliers de la table ronde, ainsi qu’à Merlin et autres questeurs du Graal ! Quant aux lieux de l’imaginaire, ils abondent aussi : Avallon, Brocéliande, Thulé…

    De conteur à Encyclopédiste, cela semble très éloigné, non ?
    Pourquoi ? Il faut bien commencer par collecter les histoires avant de les raconter… Pour moi cela fait partie d’un ensemble, dans lequel j’ajouterai la dimension du roman…

    Transmettre les choses par écrit, c’est plus ou moins compliqué que l’oralité ?
    C’est très différent, et en même temps c’est un peu la même chose. Etre inspiré en écrivant ou en racontant, quelle différence, sinon le fait d’utiliser la main ou la voix. Ce sont les dieux qui parlent à travers le scribe ou le conteur…

    Vous êtes également romancier et venez de commencer une tétralogie autour de la mythologie nordique avec La Malédiction de l’Anneau. C’est un sujet énorme ! Ce défi ne vous effrayait-il pas au départ ?
    Si, bien sûr… Mais personne – à ma connaissance – ne s’y était risqué ! Mon but a été de retourner aux sources légendaires et mythologiques dont se sont inspirés Tolkien dans « Le Seigneur des anneaux » ou Richard Wagner dans son cycle d’opéras « L’anneau du Nibelung », et d’en tirer mon propre univers romanesque, en essayant de rester fidèle à l’histoire originelle de l’anneau maudit. Mes personnages sont donc les dieux d’Asgard, Odin, Freya, Frigg, Loki, les Walkyries comme Brunehilde, les héros comme Siegmund ou Siegfried, les Nibelungen comme Alberich, les géants comme Regin, les dragons comme Fafnir. En écrivant, j’ai senti renaître en moi le souffle épique des anciens âges, et la légende a pris corps, presque malgré moi. Dieux, héros, dragons et filles de l’air attendaient de renaître de l’oubli où on les avait plongés ! Le premier tome, « Les Chants de la Walkyrie », sorti en octobre chez Belfond, raconte l’origine de la légende ayant donné naissance à « La Malédiction de l’anneau ». Le second tome, qui sortira en mai avec une belle couverture de Didier Graffet, s’appellera « Le Sommeil du dragon ». L’histoire sera vue du côté de Fafnir, le dragon abattu par Siegfried ! C’est la première fois à ma connaissance que l’on prend le point de vue du dragon pour raconter cette histoire…. Il existe aussi un site consacré à cette tétralogie romanesque : www.lamaledictiondelanneau.com

    Qu’est ce que « Croire aux fées » pour vous ?
    Croire aux miracles, à la beauté, à l’harmonie, et à la réalisation possible de ses vœux les plus chers…

    Quelle est votre créature féerique préférée et pourquoi ?
    Les cluricaunes d’Irlande, car c’est eux qui ont livré aux hommes le secret de la fabrication du whiskey !

    Votre actualité ? Vos projets en cours ?
    Plusieurs publications au printemps : « Le Traité de Faërie » d’Ismaël Mérindol en avril (Le Pré aux Clercs), « Le Sommeil du dragon », second tome de « La Malédiction de l’anneau » en mai (Belfond), un agenda du merveilleux et le tome deux de « L’Encyclopédie du légendaire » à l’automne (Le Pré aux Clercs). Et des publications de livres d’auteurs dont je suis le directeur de collection, comme Sire Cédric en mars avec son thriller gothique « L’Enfant des cimetières ».
    En tant que conteur, je vais me produire chaque premier samedi du mois à 17 h dans un salon de thé délicieux, « Caramelle », situé 6 rue de l’Arbalète 75005 Paris, à côté de la rue Mouffetard. La première aura lieu le 7 mars. Mais il est impératif de réserver au 01 43 36 60 79, car il n’y a que 45 places !

    Propos recueillis par le Peuple féerique en février 2009`

    Découvrez le BLOG d’Edouard Brasey et son actualité continue…

  • Edouard Brasey – interview

    Edouard Brasey

    Il était une fois le Merveilleux…

    Après Pierre Dubois, nous poursuivons nos rencontres avec les amis du petit Peuple et de l’Imaginaire. Cette fois-ci, c’est le conteur et auteur Edouard Brasey qui nous entretient des univers féeriques. Lui qui vient d’entamer un projet bien ambitieux sous la forme de l’Encyclopédie du Merveilleux aux éditions Le Pré aux Clercs.

    Né le 25 mars 1954 à Marseille, Edouard Brasey effectuera d’abord des études en politique et en droit pour opter pour les sciences-économiques lors de son passage à l’ESSEC en 1977. Tout cela le mène à travailler dans un cabinet d’audit américain, puis, très vite, à devenir journaliste économique et enfin journaliste littéraire pour le magazine Lire. C’était sans compter sur les fées qui allaient lui suggérer d’emprunter un autre chemin. Titulaire d’un DEA en études cinématographiques en 1984, et fort de son expérience de journaliste, Edouard Brasey passe à l’écriture d’essais divers et se révèle dans une autre passion : l’art de conter. Si le conte le mène à rencontrer le public lors de nombreux spectacles, la plume l’entraîne dans le tourbillon de Faerie avec une première Enquête sur l’existence des fées et des esprits de la nature (Filipachi 1996, J’ai Lu 1998). Mais on le connaît surtout pour la collection l’Univers féerique chez Pygmalion ainsi que pour Le guide du Chasseur de fées (Le Pré aux Clercs, 2005). Et voilà que cette même année allait aboutir, avec la parution en octobre 2005, à l’Encyclopédie du Merveilleux.

     

    Peuples de la lumière

    Peuples de la LumièreLe premier volume de cette encyclopédie parue aux éditions Le Pré aux Clercs porte sur les peuples de la lumière. Anges, fées, elfes, nains, djinns et nymphes se partagent les nombreuses pages bien documentées, parsemées d’anecdotes. A ce premier tome feront suite des volumes consacrés à un bestiaire féerique, aux peuples de l’ombre , aux héros, aux lieux de légendes, aux objets. Un sixième et dernier tome prévu devrait faire la part belle aux auteurs de l’Imaginaire. Une œuvre colossale qui garnira bientôt toutes les bibliothèques des passionnés de merveilleux, de fantasy et de féerie.

    La magie de Sandrine Gestin

    Cerise sur le gâteau, un soin particulier a été apporté à la maquette et aux illustrations. Sur des pages imitant le parchemin, une très jolie iconographie mêlant tableaux de maître et esquisses diverses. Le livre a également bénéficié du talent de Sandrine Gestin, reconnue aujourd’hui comme l’une des meilleures illustratrices de l’Imaginaire avec une prédilection pour les êtres de lumière. Autant dire que l’accord pour ce premier volume est parfait.

    La parole au conteur

    Laissons maintenant l’auteur de cette ravissante encyclopédie répondre aux quelques questions que nous avons voulu lui poser…

    Comment est née votre passion pour l’Imaginaire ?
    Edouard Brasey : Je crois que j’ai toujours considéré l’Imaginaire non pas comme un refuge ou une évasion, mais comme l’intégralité du Réel, dont ce que nous nommons « réel » n’est qu’une petite succursale, celle où nous vivons… La présence de l’invisible me semble une réalité incontestable, une nécessité. Il y a quelques années, un journaliste sceptique avait demandé à Jeanne Moreau, alors qu’elle avait joué le rôle d’une fée dans un film, si elle croyait à l’existence des fées. Elle répondit, superbe: « J’y crois plus qu’à la vôtre… »

    Sur votre site, on propose un voyage conté en Afrique du Nord. Une terre particulièrement riche en contes ?
    Oui, bien sûr. Dans le désert, on raconte encore comme il y a deux mille ans. J’ai raconté dans le désert blanc d’Egypte au coucher du soleil, pour un groupe de Français, mais les chameliers égyptiens écoutaient. Même s’ils ne comprenaient pas notre langue, ils m’ont remercié à la fin et m’ont qualifié du terme de « vieil homme ». Ce qui pour eux voulait dire: « le sage », celui qui a suffisamment vécu pour raconter des histoires. C’était un beau compliment qui m’a beaucoup touché…

    Après plusieurs ouvrages sur les créatures féeriques chez Pygmalion, voilà que les éditions du Pré aux Clercs vous confie un projet plutôt ambitieux: une véritable Encyclopédie du Merveilleux. En quelques mots comment définissez-vous ce terme « Merveilleux » ? On pense de prime abord aux fées mais un des tomes portera sur les ombres dont le vampire… A prendre dans un sens très large dans ce cas ?
    Je définis le Merveilleux comme la présence permanente du miraculeux et du magique dans notre vie,

    Le Bestiaire fantastiquecontrairement au fantastique qui suppose l’ingérence d’un surnaturel inquiétant dans le réel. Cela dit, vous avez raison de souligner que je vais consacrer un tome de l’Encyclopédie du Merveilleux à des créatures liées plutôt au fantastique! Mais au-delà des genres, l’idée est en effet de brosser un inventaire le plus complet et exhaustif possible de ce que l’on appelle l’Imaginaire: les êtres de Féerie, les vampires et démons, les trésors et objets magiques, les lieux imaginaires et îles enchantées, les héros et personnages, les créateurs… Cela n’a jamais été fait, en France du moins. Et cela manquait cruellement…

    Le terme « encyclopédie » fait de suite penser à celles de Pierre Dubois ou encore aux ouvrages universitaires de Claude Lecouteux. En quoi la vôtre est-elle semblable ou différente ?
    Je connais bien Pierre Dubois, qui est un ami, ainsi que Claude Lecouteux. Ce dernier est un pur universitaire. Celui-là est un poète, qui prend beaucoup de libertés avec ses sources documentaires en brodant à sa manière. Disons que je me situe modestement à mi-chemin, en essayant de concilier la rigueur de la recherche et le sérieux de la documentation avec une volonté de lisibilité, de clarté, voire d’humour. Je m’adresse à un public curieux de Fantasy ou de mythologie et qui désire savoir d’où viennent toutes ces croyances, à quelles sources elles s’alimentent… Tout en se divertissant.

    N’est-ce pas un peu paradoxal pour un conteur d’écrire des encyclopédies ? Pour un inventeur d’histoires de choisir des définitions précises ? Les dictionnaires et encyclopédies ne sont-ils pas des outils qui limitent l’imaginaire ?
    Au contraire! Car les sources auxquelles je me réfère sont vivantes: il s’agit de la tradition des légendes, des contes, des mythes, du folklore, que l’on trouve dans les livres, bien sûr, mais qui viennent avant tout de la tradition orale… Conter le monde féerique ou l’inventorier dans une encyclopédie correspond pour moi à deux aspects indispensables et complémentaires…

    Peut-on espérer un ancrage actuel dans un des tomes de cette encyclopédie, une sorte d’état des lieux d’aujourd’hui ?
    Oui, bien sûr. Nous avons prévu un tome sur les créateurs d’hier et d’aujourd’hui. Il y aura Tolkien, bien sûr, mais aussi les auteurs contemporains et les illustrateurs.

    L’illustration et la maquette sont très réussies… Sandrine Gestin fut véritablement un choix judicieux. Une volonté de proposer un bel objet ?
    Je connaissais Sandrine pour l’avoir rencontrée il y a quelques années au Salon du Livre de Figeac consacré au Fantastique. J’ai proposé son nom à l’éditeur, nous l’avons contactée et elle a accepté avec enthousiasme. Elle a notamment créé tous les croquis, une façon de dire: ce sont des êtres invisibles, on n’a pas le temps de les peindre, ils ne posent pas assez longtemps! Oui, nous avons voulu reproduire l’esprit des ouvrages médiévaux somptueusement enluminés. D’où le choix également du papier couleur de parchemin…

    On parle d’un succès pour l’imaginaire féerique ces dernières années en France. Comment expliquez-vous cette arrivée tardive et assez timide alors que ce n’est pas le cas dans la culture anglophone, par exemple ?
    Nous avons beaucoup de retard par rapport aux Anglo-Saxons, qui baignent véritablement dans cette culture. Nous autres Latins à culture cartésienne avons plus de difficultés avec le monde de Féerie. Pourtant, il s’agit de nos racines culturelles! Mais je crois qu’à présent le pli est pris, et on peut parler des fées et des elfes sans passer pour un illuminé…

    Vous qui êtes conteur et auteur, pensez-vous que l’Imaginaire doit être d’abord lu ou d’abord vécu ?
    C’est la même chose. On peut le lire et en rêver, ou le vivre et se reporter ensuite à des livres. C’est à chacun de suivre son propre chemin…

    Quels sont vos propres ouvrages de référence ?
    Parmi les collecteurs de légendes et mythes, Sébillot, Seignolle, tous les folkloristes du XIXe siècle, mais aussi Katrine Briggs, qui a publié de nombreuses encyclopédies de la Féerie en anglais. Parmi les romanciers, Arthur Machen, Charles Nodier, Anatole France…

    Pour terminer, votre plus beau souvenir de Faerie ?
    Alors que je faisais mes recherches sur la Féerie pour mon premier livre sur le sujet, Enquête sur l’existence des fées et des esprits de la nature, publié en 1996 (réedité chez J’ai Lu), j’allais souvent à la Bibliothèque Nationale de la rue de Richelieu à Paris. A plusieurs reprises, à des heures et des places très différentes, je sentais un fort parfum de lis. Ce ne pouvait pas être une voisine trop parfumée ni un système de diffusion d’odeurs inexistant dans cette vieille salle boisée surmontée d’une coupole. Alors je me suis dit qu’il s’agissait du parfum de la fée de la Bibliothèque Nationale, qui venait ainsi m’encourager… C’est un parfum délicieux, que je n’ai plus senti nulle part depuis, mais qui, étrangement, ressemble sans doute au parfum de lis qui, selon les témoignages, accompagne les apparitions mariales…

    Pour tout suivre de l’actualité d’Edouard Brasey, il vous suffit de vous rendre sur son BLOG

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