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Delphine Gache nous parle de son livre: "Les Cahiers enchantés de Lily Rose Poddington" paru aux éditions Au Bord des Continents

On commençait à croiser les œuvres féeriques de Delphine Gache dans les magazines, les expos… On se demandait si un livre sortirait bientôt et le voilà ! Les Cahiers enchantés de Lily Rose Poddington nous ouvre à l’univers (imaginaire ?) d’une petite fille très poétique… Rencontre avec l’illustratrice qui nous parle de cette belle aventure aux éditions Au Bord des Continents.


Ça fait quoi de voir son propre livre lorsqu’on le voit la première fois ?

C’est assez spécial… Il y a tant d’émotions qui se chevauchent lorsque l’on crée son tout premier livre que je ne saurais exactement décrire ce que j’ai ressenti en voyant Lily Rose pour la première fois. Bien entendu, j’étais toute excitée… Mais curieusement cette joie est doublée d’un comportement analytique réflexe. En effet, lorsque l’on sort à peine de plusieurs mois de travail et de doute, on peut difficilement s’empêcher de scruter son livre page après page, à l’affût  du moindre défaut.  Un toc qui grandit au fur et à mesure que le projet se concrétise. Une fois que tous les centimètres carrés du livre sont enfin passés au scanner, la joie et le soulagement reprennent le dessus. Seulement à cet instant, on réalise également que le travail sur lequel on a passé tant de temps s’achève là. Quelque part en moi, j’ai trouvé cela triste et angoissant. Recevoir le livre imprimé signifiait que je ne maîtrisais plus rien. Soudain, mon travail de créateur prenait fin et le livre ainsi que tous les morceaux d’âmes qu’il contient n’étaient plus simplement un secret partagé entre mes proches et l’éditeur… Mais il devenait alors un objet destiné à passer entre les mains d’autres personnes dont on ignore totalement ce qu’elles vont éprouver… quel jugement elles porteront à notre travail. Je suppose que ce sentiment est étroitement  lié au fait que ce livre soit mon tout premier livre… C’est pourquoi  je relativise au maximum… Car au fond, en dehors de tous ces détails, donner naissance à Lily Rose aura été une expérience formidable. Un rêve d’adolescent qui s’est enfin réalisé. Et en regardant ainsi les choses, il est clair qu’il est totalement jubilatoire de voir son premier livre pour la toute première fois !  

 

Ton héroïne est une petite rêveuse. Y a-t-il une part de toi en elle ?

Oui, surtout en ce qui concerne son côté rêveur ainsi que l’amour qu’elle porte à la nature et aux choses simples.  Cependant, il ne faut pas s’y méprendre, mon univers n’est pas aussi gai et coloré que le sien… Et c’est justement là que réside tout l’intérêt de donner vie à ce type de petit personnage naïf et plein d’entrain ! La magie des mondes féeriques prend alors tout son sens car on respire la vie différemment lorsqu’on veille à ce qu’au fond de soi, les petites étincelles de l’enfance restent bien animées.

Tu cites dans le livre la règle fondamentale des fées qui « consiste à ne jamais faire ce que l’on attend qu’elle fasse au moment où on l’attend ». C’est aussi vrai pour l’histoire de ce projet ?

À vrai dire, cette phrase est de Patrick…  Il est certain qu’une fée est un esprit espiègle, sans règles ni lois qui fait ce qui l’enchante avant tout. Partant de ce principe, ces petits êtres s’avèrent surprenants…  N’ayant pas eu d’autres expériences de livre illustré avant celle-ci, oui, je dois admettre que j’allais de surprises en surprises sur ce projet. En effet, j’ai appris en même temps que nous construisions ce rêve… En ce qui concerne le résultat, mon regard n’est pas suffisamment objectif… C’est à vous de me dire si LA règle des fées  a bien été honorée !

Comment te vient l’inspiration pour tes illustrations?

Cela dépend de beaucoup de paramètres. Mon inspiration est étroitement liée aux émotions et à l’état d’esprit dans lequel je me trouve au moment de créer. J’essaie toujours de m’imprégner au maximum de l’univers que je souhaite mettre en évidence avant de commencer mon travail… En effet, si ma tête ne suit pas le rêve dans lequel mon pinceau s’embarque, inéluctablement l’émotion est absente du tableau.  Personnellement, je préfère créer la nuit, je m’y sens beaucoup plus à l’aise. Le temps semble comme suspendu et rien ne vient perturber  la fragile petite bulle dans laquelle je me plonge pour vivre mes illustrations. Ce conditionnement est très important pour moi. Dans cette quête de force positive, la musique m’aide d’ailleurs considérablement…

Après, l’inspiration peut surgir à n’importe quel instant. Elle peut naître naturellement, suite à un moment de détente, mais on peut aussi la provoquer. Parfois ce sont les choses les plus insignifiantes qui nous conduisent à raconter les plus belles histoires. Il suffit d’un petit rien… Ce peut être la Nature, un objet, un regard furtif, une impression, un souvenir, une émotion… Je crois que trouver l’inspiration, c’est tout simplement savoir observer et rester attentif à ce qui passe autour de nous.  De temps en temps cela suffit à faire jaillir une très belle illustration. Après bien entendu, lorsque l’on souhaite s’envoler dans une direction particulière, il est parfois nécessaire de donner un p’tit coup d’pouce à notre esprit afin de déclencher ces émotions.  Dans ce cas précis, j’établis une petite liste de mots associés à ce que je souhaite représenter… Puis, je pars à la chasse aux images… textures, photos, dessins, tout est bon à prendre si cela évoque en moi les bonnes émotions. Le but n’étant pas de retenir les détails de ces images, mais simplement de les photographier furtivement… Grosso modo, on pourrait voir cela comme un voyage accéléré. J’en prends plein les yeux et ensuite sans laisser décanter, j’esquisse quelques croquis pour définir une piste visuelle. En général, ce sont des petits gribouillis rapides, presque illisibles que j’accompagne de quelques phrases-clés afin de retenir l’essentiel de ce que je souhaite exprimer. Je laisse reposer le tout en m’interdisant d’y revenir, afin d’avoir un regard neuf sur ce qui a été réalisé. Une fois ce travail établit, il ne me reste plus qu’à peaufiner… C’est à ce moment là qu’interviennent par flash les souvenirs des images chassées la veille…

Et techniquement, qu’utilises-tu ?

L’aquarelle et le crayon sont les deux médiums que j’aime le plus. Cela dit, il m’arrive aussi très régulièrement d’utiliser photoshop… Surtout lorsqu’il s’agit d’établir les premières bases d’une illustration. C’est un logiciel qui m’aide considérablement pour tester la composition et les couleurs de mes images.

Rêves-tu d’une suite aux cahiers de Lily Rose ?

Bien sûr ! Ce serait fantastique. C’est une très belle aventure que de donner vie à ce petit univers. Et l’air de rien, au fil des mois, on s’attache drôlement à nos personnages ! Donc oui, une suite au livre, pourquoi pas…

Il y a beaucoup de douceur et de féminité dans ton livre. Le plus bel exemple est les différentes naissances de créatures féeriques…

Merci. Il est vrai que nous avons beaucoup joué sur le côté féminin, et de manière générale sur les rêves et la naïveté caractéristiques à ceux d’une jeune enfant de l’âge de Lily Rose.  L’idée des naissances est venue au fil des multiples conversations que nous avons eues avec Patrick. De tous les sujets abordés, je crois que c’est celui que je préfère… Il y a tellement de choses à dire et à inventer… Les quatre créatures auxquelles nous faisons référence dans le livre ne sont d’ailleurs qu’une infime petite partie de tout ce qui peut être raconté…

Une touche d’humour aussi. C’est important l’humour chez les fées ?

Oui oui bien sûr ! L’espièglerie et l’humour reflètent toute la fraîcheur de l’enfance… C’est une autre manière de s’évader.

Sur quoi travailles-tu pour le moment ?

J’ai plusieurs petits projets en cours ainsi que de nombreuses idées qui font leur route et bourgeonnent progressivement… Je ne peux en souffler mot pour le moment… Tout cela doit rester dans le jardin secret des fées…

Propos recueillis par le Peuple féerique en mars 2010

Richard Ely

Né en Belgique, j'ai passé toute mon enfance à Ellezelles, village sorcier. J'ai ensuite étudié les fées, elfes et lutins à l'université tout en croisant les chemins de Pierre Dubois, Claude Seignolle, Thomas Owen... En 2007, après avoir parcouru bien des forêts et des légendes, je crée Peuple Féerique. Spécialiste du folklore féerique, auteur d'encyclopédies, de livres, d'albums, je poursuis mon exploration de ce Petit Monde de Merveilles pour le partager avec vous.

Une réflexion sur “Delphine Gache nous parle de son livre: "Les Cahiers enchantés de Lily Rose Poddington" paru aux éditions Au Bord des Continents

  • Danièle

    Je redis ici ce que j’ai exprimé ailleurs sur le web: cassez votre tirelire et offrez-vous ce livre. De plus, en ces tout premiers jours printaniers, Lily Rose ne peut que nous aider à regarder avec curiosité et tendresse les choses de la nature.
    Merci, Delphine, de nous offrir plein de couleurs et de de rêves, c’est un superbe cadeau pouyr combattre les tentations de morosité!

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